L'enlèvement des trois otages européens, deux Espagnols et une Italienne, le 23 octobre dernier sur leur lieu de résidence à Rabouni, dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf, aurait été l'œuvre d´un groupe dissident d'Al Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi). Cette hypothèse se renforce de plus en plus depuis la publication, ce week-end, d'un communiqué par lequel cette organisation terroriste commandée par Mokhtar Ben Mokhtar et son lieutenant Abdelhamid Abou Zeid dégage toute implication dans l'enlèvement de ces trois membres d´associations civiles. En revanche, Aqmi a revendiqué sa responsabilité dans d´autres opérations de prise d´otages de ressortissants occidentaux au Sahel. Prise de contact de Madrid avec les ravisseurs Cette hypothèse s'est renforcée depuis que, selon une source du ministère espagnol des Affaires étrangères, le gouvernement Zapatero avait chargé, samedi, l´ex-ambassadeur Antonio Sanchez-Benedito, un spécialiste des affaires de prise d´otages et de piraterie, d´établir des contacts avec les auteurs de cette séquestration à Tindouf en vue d´obtenir la libération des trois personnes enlevées. L´absence de revendication de cet enlèvement par Aqmi avait rendu crédible l´hypothèse d´une opération menée par un groupe de ravisseurs avec lequel l´Espagne n´entretient pas de canaux de communication, des mercenaires ou des groupes terroristes inconnus dans la région. Hier matin, l´agence Efe avait recueilli une déclaration du ministre burkinabé des Affaires étrangères, Djibril Bassolet, annonçant que son gouvernement a pu entrer en contact avec les auteurs de la prise d´otages de Tindouf. Le chef de la diplomatie du Burkina Faso s´est toutefois refusé à donner plus détails sur ces contacts, en raison, dit-il, du caractère «délicat des négociations», en se limitant à assurer que Ouagadougou «ne ménagera aucun effort pour aider à libération des otages et contribuer à la stabilité de la région». Le médiateur conseiller de Blaise Compaoré La sortie médiatique du MAE burkinabé est à prendre au sérieux, car le gouvernement de Blaise Compaoré est à l´origine de la libération des deux ressortissants espagnols enlevés en territoire mauritanien en novembre 2009. Ces derniers avaient été libérés «grâce à la médiation» du conseiller du président Compaoré, un opposant mauritanien au régime de Nouakchott, considéré comme un parfait connaisseur de la région du nord du Mali où sont séquestrés les otages aux mains d´Aqmi. C´est au service de ce dernier, qui a ses entrées auprès de cette organisation terroriste, que les autorités espagnoles ont dû avoir recours. C´est lui, en effet, qui avait négocié la libération des otages de novembre 2009 moyennant paiement d´une forte rançon par l´Espagne, en plus de la remise en liberté par Nouakchott de leur ravisseur, un certain Sahraoui, fait prisonnier par l´armée mauritanienne quelques semaines après son forfait. Arrestation de deux Sahraouis à Nouadhibou L´annonce par le gouvernement mauritanien de l´arrestation, la semaine dernière dans un hôtel de Nouadhibou où ils séjournaient depuis dix jours, de deux Sahraouis soupçonnés d´être impliqués dans la prise d´otages de Tindouf, avaient suscité des interrogations sur le silence d´Aqmi dans cette affaire qui lui avait été attribuée par les médias. Le gouvernement espagnol avait, dès le départ, refusé de se prononcer sur l´identité des ravisseurs, donnant l´impression qu´il avait des doutes déjà sur la responsabilité d Aqmi dans la prise d´otages de Rabouni. L´Espagne avait alors réclamé de l´ONU une enquête sur les mesures de sécurité dans les camps de réfugiés de Tindouf et recommandé à demi-mot à ses ressortissants d´éviter de se rendre à Tindouf. 1000 vacanciers espagnols à Tindouf Cette recommandation n´a pas été entendue par les 1000 ressortissants espagnols qui ont profité des «ponts» des 6 et 8 décembre, journées fériées en en Espagne, pour se rendre à Tindouf à bord de cinq charters. Ce voyage a été organisé à l´initiative de la Confédération Nationale des Associations de Soutien au Sahara Occidental (CEAS), présidée par José Taboada, pour marquer le soutien de la société civile espagnole à la cause sahraouie. L´initiative du CEAS est une fin de non-recevoir des recommandations faites par le gouvernement espagnol, vivement encouragées par le Maroc.