Mardi dernier à l´aéroport international de Barajas (Madrid), ils étaient 27 à s´envoler à bord d´un avion charter pour Tindouf. A son retour en Espagne hier, ce groupe pro-sahraoui comptait quatre membres en moins. Deux activistes de Médecins du monde, de l´association basque Mundubat et de Afapresdesa, l´association des familles des prisonniers et des disparus sahraouis, ont choisi de rester sur place pour «poursuivre leur mission d´aide aux réfugiés». D´autres camarades ne devraient pas tarder à les rejoindre en plein été alors que les températures dans les camps dépassent les 45º. Indice symbolique, ils sont logés à Rabouni, à 25 km au sud de Tindouf, là où trois de leurs camarades, les Espagnols Eric Gonyalons et l´Italienne Rissella Irru avaient été pris en otages le 22 octobre 2011 par un groupe du Mouvement pour l´Unicité et le Jihad en Afrique de l´Ouest (Mujao) avant d´être libérés neuf mois plus tard. «Nous savons ce que nous faisons» C´est leur meilleur argument face aux avertissements du gouvernement espagnol faisant état d´une «imminente prise d´otages» pour justifier le rapatriement des 13 ressortissants espagnols hébergés en cet endroit le 28 juillet dernier. L´un des quatre restants, Albert Sterm et sa compagne de Médecins du Monde expliquent leur choix de demeurer à Tindouf par «responsabilité, cohérence et engagement envers le peuple sahraoui». Sa déclaration se veut d´abord une réponse «au sens des responsabilités» auquel les avait appelés le ministre des Affaires étrangères García-Margallo, avant leur retour dans les camps de réfugiés, leur demandant d´annuler leur voyage. C´est, également, une réaction aux propos du Secrétaire d´Etat à la Coopération Internationale, Jesús García, qui avait qualifié jeudi dernier d´«irresponsable» le fait de continuer d´ignorer les «risques de prise d´otages alors que le CNI (services secrets espagnols) et leurs homologues des pays occidentaux activant au Sahel sont tous d´accord sur l´existence de ces indices». «Nous savons ce que nous faisons. Quitter Tindouf au moment où les populations sahraouies ont le plus besoin de nous n´a pas de sens», dit-il dans une déclaration à l´agence espagnole EFE qui a largement couvert le séjour des 27 volontaires qui a également capté l´attention des grands médias espagnols. Pour lui comme pour ses camarades, l´opération de rapatriement des 13 volontaires, effectuée par le gouvernement espagnol a été «un coup dur pour les populations sahraouies qui se sont senties abandonnées». C´est ce constat que fait aussi Jesus Martinez, délégué de Mundubat, association à laquelle appartiennent les deux otages du 22 octobre. Pour lui, le retour des coopérants «pour continuer à soutenir le peuple sahraoui n´est qu´un acte de justice». Des «liens familiaux» avec les Sahraouis Les risques de prise d´otages comme cela se fait dans toutes les régions du monde où il y a conflit, «bien sûr qu´ils existent». Pour les prévenir, il suffit de prendre les mesures de sécurité nécessaires. Justement leur voyage à Tindouf leur a permis de constater que «ces mesures ont été renforcées» par le Front Polisario. Mais plus que les mesures de sécurité, le désir des Espagnols de rester parmi les réfugiés s´explique par les liens puissants, presque «familiaux» qui se sont tissés entre les Sahraouis et les volontaires qui ont été reçus en héros à leur retour, écrivait, hier, Luis de la Vega, envoyé spécial du quotidien ABC. Le journaliste, ancien correspondant à Rabat d´où il a été expulsé pour ses reportages sur la violente prise d´assaut des camps de toile de Gdeim Izik, en novembre 2009, décrit ces émouvantes retrouvailles entre «Meriem, l´une des plus vieilles réfugiées sahraouies, et Marta Isla, présidente de l´association des Amis du peuple sahraoui, de la région de la Galice». Cette «diplomatie populaire» (titre du reportage) est ce qui a fait échec au plan de rapatriement du gouvernement espagnol qui cadrait parfaitement avec les objectifs marocains pour le Sahara occidental. Le «piège marocain» Dans une interview accordée à ce journaliste, le président sahraoui avait accusé le Maroc d´avoir œuvré à «l´isolement régional du Front Polisario et à la cessation de l´aide internationale aux réfugiés sahraouis». C´est ce piège dans lequel a failli tomber le gouvernement Rajoy dont la position sur le Sahara occidental est pourtant autrement mieux appréciée par les Sahraouis que celle (pro-marocaine) de l´ancien gouvernement socialiste de José Luis Zapatero.