La Cour de cassation italienne a confirmé jeudi la condamnation à la prison de l'ex-chef du gouvernement Silvio Berlusconi pour fraude fiscale - une première pour le Cavaliere -, mettant ainsi sous pression la fragile coalition gauche-droite au pouvoir. M. Berlusconi, 76 ans, qui avait été condamné en première instance et en appel à quatre ans de prison dont trois couverts par une amnistie, ne devrait toutefois pas aller en prison en raison de son âge. Il s'agit de la première condamnation définitive à l'encontre de Silvio Berlusconi, qui depuis son entrée en politique en 1994 a eu de nombreux démêlés judiciaires mais a toujours soit bénéficié de la prescription soit été acquitté. Le Cavaliere a aussitôt dénoncé dans un message vidéo une "condamnation dénuée de tout fondement", évoquant "un véritable acharnement judiciaire sans égal". La décision de la Cour de cassation est un petit séisme dans le paysage politique italien, tant le personnage de M. Berlusconi polarise les passions, et met en péril la fragile coalition au pouvoir. Le chef du gouvernement italien Enrico Letta a d'ailleurs aussitôt appelé à la "sérénité" et au "respect de la magistrature et de ses décisions", mettant en avant "l'intérêt de l'Italie". Les avocats du Cavaliere ne l'entendent pas de cette oreille et ont d'ores et déjà annoncé vouloir entreprendre "toute initiative utile, y compris au niveau européen (devant la Cour européenne des Droits de l'Homme, ndlr), pour obtenir que cette sentence injuste soit radicalement modifiée". M. Berlusconi a pour sa part assuré qu'il n'entendait pas se retirer: "Nous devons continuer à combattre, à faire de la politique, pour réaliser toutes les réformes nécessaires". Une partie de la gauche pourrait juger impensable de continuer à gouverner avec le parti d'une personnalité condamnée et provoquer de nouvelles élections. "Il n'est pas possible d'imaginer que le PD (Parti démocrate, gauche) puisse rester allié du parti de Silvio Berlusconi", a ainsi réagi Nichi Vendola, chef du petit parti de gauche Sinistra e Liberta (SEL), proche du PD. Plus prudent mais méfiant, le chef du PD, Guglielmo Epifani, a assuré que son parti "suivra avec attention le comportement du PDL", appelant la droite à "un comportement responsable (...) nécessaire dans une phase de crise grave comme celle que traverse le pays". Jeudi, le Cavaliere, trois fois président du Conseil, a été condamné pour avoir artificiellement "gonflé" le prix des droits de diffusion de films, achetés via des sociétés écrans lui appartenant, au moment de leur revente à son empire audiovisuel Mediaset. Sa condamnation à l'interdiction d'exercer une fonction publique pendant cinq ans a en revanche été renvoyée par les juges suprêmes devant une nouvelle cour d'appel. Mercredi, ses deux avocats avaient tenté de démontrer l'innocence du Cavaliere devant la juridiction suprême. "Je n'ai jamais mis sur pied un système de fraude fiscale", s'est encore défendu jeudi soir le Cavaliere. "Je suis fier d'avoir contribué à la richesse du pays en versant des milliards d'impôts à l'Etat italien". M. Berlusconi, qui semble avoir vieilli en quelques mois, a "vécu cette attente avec angoisse et préoccupation", avait confié avant le verdict Daniela Santanche, une de ses proches. En juin, il avait été en outre condamné à sept ans de prison et à l'interdiction à vie d'exercer un mandat public pour abus de pouvoir et prostitution de mineure dans l'affaire Rubygate, mais il a interjeté appel de ce jugement. Jeudi soir, devant le palais Grazioli, résidence privée du Cavaliere à Rome, un petit groupe de partisans inconditionnels se faisant appeler "l'armée" de Berlusconi manifestaient leur attachement à leur chef.