Face à la colère des Marocains, le roi a dû annuler dimanche soir la grâce accordée à un pédophile espagnol. Malgré cette annonce du monarque, les manifestants marocains exigent que le pédophile espagnol, qui aurait déjà quitté le Maroc, soit rapidement de nouveau arrêté et réincarcéré. Des sit-in sont prévus aujourd'hui à Casablanca, la capitale économique, et demain à Rabat. Après quatre jours de manifestations populaires, violemment réprimées par le régime, le roi du Maroc, Mohammed VI, a dû donc annoncer l'annulation de la grâce accordée à un Espagnol condamné pour viol d'enfants. Le palais, qui nie toute responsabilité dans ce scandaleux choix, cherche à calmer la colère des Marocains. Malgré sa décision, une nouvelle manifestation de plusieurs milliers de personnes a eu lieu dimanche soir à Kénitra, là-même où le condamné espagnol a vécu puis a été incarcéré. Des sit-in programmés aujourd'hui à Casablanca et mercredi à Rabat sont pour l'heure maintenus, tandis que l'affaire a été rebaptisée «DanielGate» sur les réseaux sociaux. Selon les agences de presse occidentales, «le problème de la pédophilie est explosif au Maroc, où l'ONG «Touche pas à mon enfant» estime à 26 000 le nombre d'enfants violés par an, soit 71 par jour. Une partie de ces délits est commise par des réseaux de pédophiles bien organisés, qui évoluent dans le milieu de la jet-set de Marrakech (...), y compris par de puissants hommes politiques et chefs d'entreprises européens, a rapporté El Mundo. Malheureusement, le pays voisin est devenu l'une des principales destinations de tourisme sexuel et de pédophilie. Il se trouve également que le roi avait déjà gracié un autre pédophile français en 2006. Selon le journal El Pais, le pédophile et agent de renseignement espagnol Galvan est déjà entré jeudi en Espagne, par la ville de Ceuta, située dans une enclave de la côte marocaine. Il demeure depuis dans un lieu inconnu, ajoute le journal. Le palais royal a souligné dans un communiqué que le ministre marocain de la Justice, Mustapha Ramid, devra «examiner avec son homologue espagnol les suites à donner à l'annulation de cette grâce», une formule qui «ouvre la voie» à une demande de Rabat pour que le pédophile purge le reste de sa peine, selon l'ambassadeur d'Espagne au Maroc, Alberto Navarro, cité par El Pais. Selon le quotidien espagnol, «Galvan Viña ne peut être extradé au Maroc car il est citoyen espagnol. Mais il peut, en vertu des accords hispano-marocains, purger sa peine en Espagne». Le condamné avait d'ailleurs sollicité son transfert dans une prison espagnole. L'annonce de cette grâce pour un homme condamné pour crimes à 30 ans de prison avait fait scandale au Maroc. À tel point que le palais a annoncé, dans le courant du week-end, l'ouverture d'une enquête sur cette «regrettable libération» pour déterminer «les responsabilités et les défaillances». Moins de 24 heures plus tard, le souverain marocain a donc même décidé d'annuler la grâce. Mais Daniel Galvan aurait déjà quitté le territoire et, pour mettre en œuvre la mesure, le Maroc va devoir retrouver le condamné. À ce titre, le texte du palais royal note que le ministre marocain de la Justice, Mustapha Ramid, devra «examiner avec son homologue espagnol les suites à donner à l'annulation de cette grâce». Les dirigeants politiques marocains, du pouvoir et de l'opposition sont restés très discrets sur cette affaire. Les médias officiels et privés marocains sont quant à eux mobilisés pour calmer les esprits. C'est uniquement par les réseaux sociaux que l'information réelle circule et se propage. Le scandale gagne l'Espagne L'affaire DanielGate a gagné désormais l'Espagne. Le parti socialiste PSOE devait interpeller hier le gouvernement à la chambre des députés pour avoir «une explication urgente» sur le cas de Daniel Galvan et savoir si un quelconque département de l'exécutif espagnol «a suggéré» d'inscrire son nom sur la liste. «Quel département du gouvernement espagnol a suggéré la grâce pour cette personne ?», demande dans ce communiqué Elena Valenciano, la vice-secrétaire générale du parti. Elle juge «d'une extrême gravité» le fait qu'une personne condamnée à 30 ans de prison pour avoir abusé de 11 enfants puisse être graciée». Ce sont les services de renseignement espagnols qui ont insisté auprès de Rabat pour inscrire son nom sur la liste des détenus espagnols à gracier, selon une source proche du dossier consultée par Lakome. Le pédophile pourrait être un agent irakien exfiltré au Maroc. Notons que l'affaire Daniel Galvan intervient dans une période difficile pour le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy, déjà éclaboussé par une affaire de corruption pour laquelle l'opposition réclame sa tête.