Le conseil national de cette organisation ne s'est pas réuni depuis trois ans. Rien ne va plus dans la maison des moudjahidine après le report, sine die, du 10e congrès de leur organisation, l'ONM, prévu pour le 18 février dernier. Ce report, que d'aucuns qualifient de tactique, devrait permettre à l'ONM de réserver sa position sur les dossiers brûlants de l'actualité nationale, notamment sur la présidentielle de 2004, après le congrès du FLN qui, lui, s'annonce très serré. La question des «faux moudjahidine» diviserait les rangs de la plus importante organisation de la famille révolutionnaire, selon certaines indiscrétions. Cependant, une partie de ce scandale représenté par l'affaire des «magistrats faussaires», déclenchée en 1991 par Mellouk Benyoucef, fonctionnaire au ministère de la Justice, n'a pas empêché l'ONM de tenir deux congrès depuis, rétorquent certains. Certes M.Mellouk a relancé cette affaire en saisissant le premier magistrat du pays, en date du 4 novembre 2002, suite à quoi il s'est présenté à la présidence de la République par deux fois, en janvier et février 2003, avant d'en être «rabroué» par les responsables de la sécurité du palais d'El-Mouradia. A cela s'ajoute la montée au créneau des moudjahidine de la wilaya de Tipasa, sous la houlette de Bougouba. Il n'en demeure pas moins que les véritables raisons de ce report qui ne dit pas son nom sont à rechercher ailleurs, selon l'aveu même de certains membres de l'organisation. Premier indice: le conseil national de l'ONM ne s'est pas réuni depuis trois ans, selon les révélations d'un de ses membres. Autrement dit, l'ONM qui, au même titre que les organisations de masse, faisait la pluie et le beau temps, serait en train de subir le contrecoup de son implication dans l'élection présidentielle de 1999. Second indice: la non-application de la loi sur les moudjahidine et des ayants droit de 1999 à défaut de décrets d'application, promis solennellement par le ministre Mohamed Chérif Abbas en plénière de l'APN. Troisième indice: l'implication du président du Conseil de la nation, M.Abdelkader Bensalah, le 30 décembre 2002, dans la polémique autour de feu Abane Ramdane. Pour rappel, M.Bensalah a cru bon de conseiller à l'ONM de rester «à l'abri de toutes les influences politiques». Lors d'une audience accordée aux membres du secrétariat national de l'ONM, M.Bensalah a souhaité également voir en l'organisation un catalyseur de l'unité nationale et un gardien de la mémoire historique de la nation. Tous ces indices tendent à montrer que l'Organisation des moudjahidine vit un malaise profond. Au-delà du fait que ses premiers responsables sont quasiment injoignables, force est de constater que l'ONM donne la piteuse impression d'être dépassée par les événements. Est-ce à dire que l'ONM vit aujourd'hui un problème de perspective ou bien que les «compromissions» auxquelles elle s'est livrée ces trois dernières années, selon les propres termes de certains de ses membres, n'ont fini par la vider de sa substance. Même si on admet que cette opinion est quelque peu excessive, on ne peut s'empêcher de s'interroger sur le silence radio observé sur la scène politique et sociale. D'autant qu'en ce qui concerne certains dossiers, tel celui de la crise en Kabylie, les militants de base de l'ONM ont décidé d'assumer leurs responsabilités en s'opposant aux dérives «programmées» du mouvement en dehors des cette structure. Idem pour l'échéance de 2004, où on assiste à un tiraillement entre les différentes tendances qui composent l'ONM, et ce, au fur et à mesure qu'approche la date fatidique. La crise au sein de l'ONM a atteint le point de non-retour. Ce n'est pas la première fois que cette organisation sensible est traversée par des crises. Mais ce qui complique les choses présentement, c'est, selon les observateurs, l'absence d'arbitrage, car le premier magistrat, autorité tout indiquée pour régler ce genre de différend, est elle-même au centre de tous les enjeux.