En 1959, de Gaulle prononce un discours dans lequel il reconnaît le droit du peuple algérien à l'autodétermination. A cette date, le Gouvernement provisoire algérien (Gpra) implose. La course au pouvoir était alors ouverte et les divergences, jusque-là contenues par les impératifs de la guerre, apparaissent au grand jour. Dès la signature des Accords d'Evian, le 19 mars 1962, les trois clans du Gpra (les activistes du Fln, les rescapés du Mtld et les partisans de l'Udma) se déchirent pour la prise du pouvoir. La nomenklatura, tiraillée par des aspirations contradictoires, projette le pays vers des perspectives hostiles. Etant au centre de ces luttes claniques, le Fln en paye les frais. L'armée des frontières, stationnée au Maroc, pénètre en force à l'intérieur du pays, en écrasant sur son passage, la résistance de l'intérieur. Dans cette course effrénée pour le pouvoir, les protagonistes convoitaient l'aura impérissable du FLN historique. Sortant d'une guerre épouvantable, le Fln a atteint les objectifs inscrits dans ses textes fondamentaux et parvenu à la plénitude de son objectif stratégique, à savoir le recouvrement de l'Indépendance nationale. La course au pouvoir devait s'appuyer sur un instrument à même de lui conférer une certaine légitimité. De ce fait, le parti est devenu un impératif indispensable pour les protagonistes. Le deuxième congrès du Fln, organisé à Tripoli, reconduit les mêmes clivages avec en plus, la présence des ministres d'Etat, tels Boudiaf, Khider, Aït Ahmed, Lachref et Ben Bella. C'est entre les mains de ce dernier que le parti tombe. Ben Bella devenu le nouveau maître d'Alger, instrumentalise le parti au service de ses desseins. Boudiaf a été exilé au sud du pays, Aït Ahmed se retire en Kabylie pour constituer plus tard la rébellion et Khider «prend la fuite» à l'étranger. Cela sans compter l'exclusion de plusieurs militants et l'exécution pure et simple d'autres: Medeghri en constitue un exemple. Aussi, Ben Bella a-t-il complètement vidé le parti historique de sa substance? Il fera de cet héritage multipolaire un parti unique calqué sur la doctrine du socialisme spécifique inventée pour la circonstance. Les recommandations du Congrès de la Soummam, en 1956, furent définitivement enterrées. La primauté du militaire sur le civil consacré et la nature du régime succédant à l'Etat colonial s'est dessinée avec Ben Bella comme un paravent civil. Les dérives s'en vont crescendo quand le parti a été orienté vers un arabisme pompeux qui a fait le lit des malheurs d'une Algérie naissante.