Au Conseil de sécurité où tous les efforts à trouver un impossible compromis ont échoué, l'on tourne quelque peu en rond. Il est patent qu'une majorité s'est dégagée au Conseil de sécurité, tant contre le vote d'une deuxième résolution, que cette majorité estime, - dans l'état actuel des choses -, injustifiée, que contre la guerre que les Etats-Unis, soutenus par la Grande-Bretagne et l'Espagne, envisagent de déclencher en Irak. Au bord de la déroute diplomatique au Conseil de sécurité, - même si Washington se dit déterminé à passer outre à un vote négatif -, la Maison-Blanche tente d'amadouer les opposants en leur donnant un os à ronger. Ainsi, dans un discours largement diffusé, vendredi, le président américain, George W.Bush, s'est attelé à désarmer les suspicions tant en réactivant le dossier palestinien, qu'en levant les sanctions contre le Pakistan, l'un des six «indécis» du Conseil de sécurité. M.Bush s'attend-il à un renvoi d'ascenseur de la part du président pakistanais, Pervez Musharraf, qui a affirmé, mercredi dernier, que son pays allait opter pour l'abstention? Il en est un peu de même pour ce qui est du dossier du Proche-Orient, dont la «feuille de route», du quartette, fut longtemps gardée sous le coude par la Maison-Blanche, dans l'objectif, inavoué, de ne pas embarrasser son allié israélien, qui mène une guerre d'épuration contre la population palestinienne. La feuille de route, pilotée par l'ONU, l'Union européenne, la Russie et les Etats-Unis, devait proposer une ouverture pour trouver une solution au contentieux du Proche-Orient. En réactivant la question proche-orientale au moment où la politique irakienne des Etats-Unis est fermement combattue au Conseil de sécurité par ces mêmes partenaires du quartette, - la France et la Russie menaçant d'user de leur droit de veto, Kofi Annan mettant, à maintes reprises, en garde Washington contre une décision unilatérale allant à l'encontre du chapitre 7 de la Charte de l'ONU -, M, Bush espère-t-il en tirer des dividendes? Il reste que son annonce sur le Proche-Orient en ces moments incertains est rien moins qu'innocente. Ce qui, en revanche, est aujourd'hui admis, est qu'il est de plus en plus improbable que le vote pour une deuxième résolution, comme le souhaite Washington, ait lieu. Cela d'autant plus que l'ultimatum américain à l'Irak, le sommant de désarmer, expire demain. Dès lors, les Etats-Unis entreront-ils en guerre sans mandat de l'ONU? Telle est, en fait, la question qui taraude ces jours-ci analystes et observateurs. Alors que Français, Russes et Chinois donnent une lecture restrictive à la résolution 1441, la limitant aux objectifs que l'ONU lui assigne qui, à l'évidence, excluent un recours à la force en l'état actuel des choses, Américains et Britanniques estiment, en revanche, que la résolution en question ouvre la voie à une frappe militaire de l'Irak. C'est du moins l'avis que défend le secrétaire britannique au Foreign Office, Jack Straw, qui indique: «Nous avons toujours dit que nous avions une base légale nécessaire» à une telle action militaire. Il dira encore: «Si nous n'allons pas jusqu'au bout de ce que dit clairement (la résolution 1441), à savoir que s'il (Saddam Hussein) ne saisit pas sa dernière chance, des conséquences graves devront survenir, c'est alors que l'autorité de l'ONU sera remise en question.» L'autorité de l'ONU n'a-t-elle pas été remise en question lorsque, à plusieurs reprises, les Etats-Unis ont usé de leur veto pour bloquer des décisions prises par le Conseil de sécurité dans le cadre du dossier proche-oriental? Mais sans doute que le problème n'est plus là aujourd'hui, encore que les propos du chef de la diplomatie britannique soient à tout le moins spécieux, surtout lorsqu'il regrette que la menace du veto franco-russe rend impossible le vote d'une résolution autorisant la guerre contre l'Irak. Au moment où Américains et Britanniques cherchent à contourner l'opposition internationale à l'ouverture des hostilités en Irak, à Bagdad les inspecteurs poursuivent leur travail, alors que les Irakiens ont procédé, hier, à la destruction de quatre nouveaux missiles Al-Samoud 2. En outre, Bagdad a fait parvenir, vendredi, au Conseil de sécurité, un exposé sur le gaz VX remis au chef des experts onusiens, Hans Blix. Celui-ci a, par ailleurs, précisé les tâches encore à effectuer par les inspecteurs en désarmement. Au moment où, au plan diplomatique, l'impasse est totale, d'aucuns estiment la guerre désormais inévitable.