Tous les stratèges du Pentagone admettent les erreurs de leur ministre ainsi que le bourbier dans lequel leur armée vient de s'enfoncer. Les responsables de la Maison-Blanche se retrouvent dans une situation inconfortable dans leur guerre contre l'Irak. La décision de stopper momentanément l'avancée des troupes vers Bagdad a suscité moult interrogations dans les milieux politico-médiatiques. Cette décision est intervenue après une longue hésitation pour l'annoncer. Ce semi-aveu d'échec intervient au moment où le matériel lourd de l'Oncle Sam était évacué de Turquie et du nord de l'Irak en vue de renforcer le front sud. Sans doute, le front nord ne sera-t-il pas ouvert de si tôt? Hier, à Bagdad, l'aviation américaines a bombardé à l'aveuglette, faisant plusieurs dizaines de morts parmi les civils, alors que sur le front sud les forces aériennes ont bombardé les hangars de stocks alimentaires à Basra, tel qu'annoncé par des correspondants de la chaîne Al-Jazira sur les lieux et confirmé par le ministre irakien de la Communication. Par ailleurs, les pertes humaines et matérielles des forces coalisées ne cessent d'augmenter au fil des jours de cette guerre qui tend à être d'une durée indéterminée. Selon les différentes informations provenant du front, les choses s'aggravent pour les coalisés qui trouvent du mal à justifier cette guerre contre l'Irak. Trop de temps perdu, trop de pertes humaines et matérielles par «accidents» et des différends entre les politiques et les militaires mêlés à des affaires juteuses générées par cette guerre. Du côté des Etats-Unis, des familles des soldats engagés dans le conflit, commencent à se poser des questions. Elles ont été les premières à voir se profiler ce dangereux bourbier irakien, pareil à celui du Vietnam qui avait, en son temps, coûté son poste au président Johnson. Ce sont là autant d'imprévus qui ont forcé les Américains à revoir leur stratégie aussi bien sur le front sud, où ils ont essuyé de lourdes pertes, qu'au nord où l'équation turque et kurde a définitivement faussé tous leurs calculs. Un autre imprévu hante les forces alliées. L'information d'infiltration des membres du djihad islamique a été annoncée officiellement par les responsables de cette organisation. En effet, le ministre de l'Information irakien a annoncé qu'un avion à décollage vertical Harrier et un hélicoptère d'attaque Apache ont été abattus en Irak et leur équipage tué. L'hélicoptère a été abattu dans le sud, dans la région de Bassora, par des combattants des tribus qui ont tué ses deux membres d'équipage, a déclaré le ministre. Dans la région de Qadissiya (centre), «les membres du parti Bâas ont abattu un Harrier, qui a explosé en vol», a affirmé M.Sahhaf. Des parties de cet appareil ont été récupérées par la défense civile, a déclaré le ministre, ajoutant que la carte d'identité du pilote a été retrouvée. Le ministre irakien a affirmé, par ailleurs, que les «Irakiens ont détruit quatre chars» des forces de la coalition américano-britannique et «tué leur équipage», ajoutant que les Irakiens «ont enterré les mercenaires américains et britanniques conformément à leur rite». Concernant la région de Bassora, dans le sud de l'Irak, M.Sahhaf a dénoncé le bombardement de régions civiles. Les forces de la coalition «ont bombardé un marché de fruits et légumes dans le quartier de Hamdane, le quartier civil d'Al-Zeytoun et une entreprise de pétrole: Naft al-Janoub (pétrole du sud), et le complexe de la télévision à Bassora», a déclaré M.Sahhaf, qui n'a pas fait état de victimes lors de ces bombardements. Le ministre irakien a dénoncé, par ailleurs, l'interdiction imposée par les forces de la coalition à quatre navires étrangers, chargés de savon et de produits alimentaires, dont du lait pour bébé, d'accoster Oum Qasr (sud). Pour sa part, le chef d'état-major interarmées américain, le général Richard Myers dans une interview à la BBC, a déclaré que «les combats les plus durs sont encore devant nous». Interrogé pour savoir si la guerre durerait des semaines ou des mois, le chef d'état-major interarmées américain a seulement répondu qu'elle serait «déterminée par les événements plutôt que par un plan rigide». Encore un aveu, en somme, que les Américains sont en passe de réviser leur stratégie et qu'ils auront fort à faire pour se sortir du bourbier dans lequel ils se sont volontairement mis. En ce qui concerne la résistance irakienne, le chef d'état-major interarmées a reconnu «la ténacité, l'audace, le caractère féroce de ce que nous appelons les commandos de la mort du régime».