L'extension du conflit irakien à d'autres régions de la planète ne fait plus de doute pour beaucoup d'observateurs. Comment qualifier les frappes qui ont visé hier le convoi qui évacuait l'ambassadeur russe en Irak vers la Syrie? Peut-on parler, là encore, de «tirs amis» sachant que les Russes ne sont plus très «copains-copains» avec les Américains depuis le déclenchement de la guerre contre l'Irak? Le convoi qui transportait l'ambassadeur russe, sa garde et d'autres diplomates, a été pris pour cible hier. L'ambassadeur, Vladimir Titorenko, son secrétaire et d'autres personnes ont été blessés. Le ministère des Affaires étrangères russe avait, pourtant, pris la peine d'annoncer ce convoi plusieurs heures auparavant. Les Russes, déjà «vexés» plusieurs fois par les Américains durant ces dernières semaines, ont préféré se demander si cette attaque venait des Américains ou des Irakiens. Une perche de salut inespérée pour le Centcom (Commandement central des forces alliées) d'accuser les forces irakiennes d'être derrière cette attaque. C'est pourtant ce même Centcom qui annonçait, quelques heures auparavant, que l'armée irakienne n'avait plus les moyens de constituer une quelconque menace et n'était plus une force en tant que telle. Une pareille frappe, il faut le dire, n'a pu être menée que par des avions ou des canons à longue portée. Deux armes qui font cruellement défaut à l'Irak depuis les quelques douze années d'embargo et les mesures draconiennes de désarmement de son armée sous l'égide des Américains et de l'ONU. Après l'annulation par les Russes de la ratification du Traité de non-prolifération de certaines armes balistiques et nucléaires, et à la suite de ce grave précédent, il faut dire que les deux pays frôlent la rupture diplomatique. Curieuse coïncidence calendaire, la conseillère du président américain pour la sécurité nationale, Condoleezza Rice, est attendue aujourd'hui à Moscou où elle doit, notamment, être reçue par le président russe, Vladimir Poutine. Les observateurs estiment que des «explications» devaient être demandées à Rice à l'occasion de cette visite dont les «objectifs stratégiques» sont fortement compromis. Ce nouveau pic de tension intervient au moment où les conflits continuent d'aller crescendo dans la région du Golfe entre les USA d'un côté et la Syrie, l'Iran et la Turquie de l'autre. Des désaccords risquent même de surgir avec les Kurdes depuis le «tir ami des Américains» qui a fait 12 morts et 44 blessés parmi les Peshmergas. Autant d'éléments qui plaident en faveur des risques d'extension du conflit armée bien au-delà des frontières irakiennes. Cela d'autant plus que Tsahal, sous la conduite de Sharon, poursuit sa politique musclée visant la déportation des Palestiniens hors des territoires autonomes en y implantant de nouvelles colonies au vu et au su de tous. Le conflit risque aussi de toucher l'extrême Est de l'Asie puisque la Corée du Nord, qui dit tirer les bonnes leçons de ce qui se passe en Irak après sa «studieuse collaboration avec les inspecteurs de l'ONU en matière de désarmement», se prépare déjà à entrer en guerre. Pyongyang a, hier, officiellement accusé Washington de se servir de la réunion, mercredi, du Conseil de sécurité à propos du programme nucléaire nord-coréen comme d'un «prélude à la guerre». La Corée du Nord, qui se prépare déjà à entrer en guerre, testant de nouveaux armements et menaçant ouvertement ses voisins alliés des USA, le Japon et la Corée du Sud en l'occurrence, a, d'entrée de jeu, indiqué qu'elle «ne reconnaîtrait aucune résolution que pourrait prendre le Conseil de sécurité». Entre Syriens et Coréens du Nord, les canons des Américains balancent.