A l'ombre de la guerre contre l'Irak se joue le sort de la Palestine. Le Premier ministre palestinien Mahmoud Abbas, alias Abou Mazen, désigné le 19 mars dernier par Yasser Arafat sous la pression des Etats-Unis, devrait annoncer, dans les prochains jours, la composition de son gouvernement comme l'a annoncé jeudi dernier le ministre palestinien du Plan et de la Coopération internationale, Nabil Chaath. Abou Mazen devrait d'abord présenter au Comité central du Fatah, le mouvement du président Yasser Arafat, «les résultats de ses consultations à Gaza et Ramallah avec les représentants des différentes factions palestiniennes». Auparavant, plusieurs divergences sont apparues entre ces dernières. Si le Front démocratique de libération de la Palestine (Fdlp), mouvement nationaliste radical, s'est dit prêt à rallier le cabinet de Mahmoud Abbas, quoiqu'il ait rejeté les accords d'Oslo de 1993, en revanche, le Front populaire de libération de la Palestine (Fplp), -le mouvement de gauche de Naief Hawatmeh-, a catégoriquement rejeté tout ralliement au futur cabinet de M.Abbas. Tandis que des représentants du Hamas et du Jihad islamique, réfutant toute idée de participation à n'importe quel gouvernement dont le programme serait basé sur les accords d'Oslo qui reconnaissent l'existence d'Israël. Le programme de la nouvelle formation devrait se concentrer sur les réformes de l'Autorité palestinienne. Cela dans l'attente de la publication, fort attendue, de la «feuille de route», plan de paix mis au point par le quartette (USA, Russie, ONU et UE) qui prévoit la création d'un Etat palestinien d'ici à 2005. Un plan de paix sur lequel les Israéliens ont d'ores et déjà émis des réserves. Ces réserves semblent concerner l'ensemble de la «feuille de route», que Sharon veut à sa mesure, conditionnant l'accord de Tel-Aviv à un arrêt des attaques palestiniennes, érigé en préalable à toute reprise des négociations, tout en s'opposant au gel de la colonisation israélienne en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, prévu par la «feuille de route». Cet ensemble de requêtes et conditions a pour but de garantir à Israël de pouvoir, en permanence, tirer les ficelles du fait que ce sont eux qui décideront si la «violence» a cessé et si l'Autorité palestinienne en fait suffisamment pour la combattre. D'autant plus que la «feuille de route», comme par hasard, n'impose pas à Israël de démanteler ses implantations, mais de les geler une fois que les Palestiniens auront rempli leur part du contrat. En outre, ce plan ne mentionne en rien les frontières du futur Etat palestinien et ne fournit aucune indication sur la structure de sa souveraineté. En ne demandant aucun retrait israélien aux frontières de 1967, ce plan fournit clairement l'ambiguïté nécessaire à Sharon pour mettre en avant une multitude de conditions qui vont priver cette initiative d'orientation et d'élan. Une ambiguïté qui laisse la voie libre au Premier ministre israélien d'approuver un plan du ministère israélien de la Défense visant à déplacer de près de vingt kilomètres vers l'est la ‘'clôture de sécurité'' en cours de construction en Cisjordanie. Même si Ariel Sharon a décidé de ne pas officialiser cette décision pour ne pas indisposer, pour le moment, les Etats-Unis. Un différend que le ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer, tente d'aplanir lors de la visite de trois jours qu'il effectue, depuis hier, au Proche-Orient. Au cours de son séjour,. Fischer doit avoir des entretiens avec le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, et le nouveau chef de la diplomatie israélienne, Sylvan Shalom, avant de rencontrer le président de l'Autorité palestinienne, Yasser Arafat, et le Premier ministre palestinien, Mahmoud Abbas. Il faut, de toute évidence, une feuille de route pour pouvoir défricher la feuille de route de Bush.