L'Ugta accuse les pouvoirs publics de vouloir noyer la commission mixte. La grève n'est pas à écarter. Le dossier de la Fonction publique continue d'élargir le fossé entre l'Ugta et l'Exécutif à un jet de pierre de la bipartite. La section de la Fonction publique de la Centrale syndicale, dans une conférence de presse, n'a pas manqué l'occasion de rendre le coup au ministre du Travail, lequel, à travers ses déclarations sur les ondes de la Chaîne III, semble vouloir lancer un ballon-sonde pour tester le syndicat. Pour sa part, le patron de la Centrale syndicale, Sidi Saïd, présent à la conférence de presse, n'a pas pu résister plus longtemps pour prendre la parole. Pour lui, «il y a quelque chose qui se peaufine au niveau de l'Exécutif autour du statut de la Fonction publique (...) faire les jeux sans nous, c'est jouer avec le feu.» «Si les mesures concernant la dépermanisation rapportées par le ministre se révèlent une action concertée, le pouvoir pourra être confronté à toutes formes de condamnation que pourra entreprendre le syndicat dans le cadre de la loi.» Nul n'empêche de sentir que le dossier de la Fonction publique n'est autre qu'une bombe à retardement qui risque d'empoisonner davantage le climat entre l'Exécutif et le partenaire social. Selon les propos des conférenciers, les pouvoirs publics veulent doubler l'Ugta, en dépit des accords conclus lors de la précédente bipartite. A ce titre, le patron de la Centrale syndicale a tenu à rappeler qu'un changement sans le cadre déterminé, c'est-à-dire la bipartite et le groupe de travail qui planche sur la question, sera nul et non avenu. Pressé par la presse, Sidi Saïd a fini par lâcher le morceau. Il faut dire qu'il n'attendait que cela pour se démarquer de ce qui pourrait venir des pouvoirs publics. «En fait, les pouvoirs publics cachent une velléité de filialisation de la Fonction publique pour pouvoir aboutir à une vaste compression dans le secteur», a-t-il indiqué en ajoutant que cela n'est pas un fait nouveau puisqu'il «obéit à la volonté de la Banque mondiale et du FMI, qui exhortent le pays à réduire au maximum le budget de l'Etat alloué aux salaires». Celui-ci, selon le FMI, est supérieur à la norme internationale. Par ailleurs, sur le plan pratique dans l'exécution des réformes, l'Ugta reproche à l'Exécutif, de trop se référer d'une manière dogmatique au rapport Sebbih qui est au diapason avec la filialisation du secteur. L'Ugta n'a trouvé d'autre explication à l'attitude du gouvernement, que de vouloir noyer le travail de la commission mixte qui continue son travail. «On veut créer au sein de la Fonction publique des catégories sociales. Des superfonctionnaires, des moyens et des minables fonctionnaires qui sont les 300.000 agents spécialisés dont les pouvoirs publics veulent se débarrasser.» Si cette idée ingénieuse se confirme, il s'agira donc d'une compression au sein même de l'Ugta. En perdant 300.000 adhérents, et en se faisant filialisées, les 7 fédérations ne pourront constituer une force pour affronter les changements. Comme une prémonition, l'Ugta compte contrecarrer tout imprévu par l'élaboration d'un projet de loi relatif au statut de la Fonction publique qui sera soumis aux pouvoirs publics dès son adoption par les experts et les cadres syndicaux. Le statut de la Fonction publique, au centre des enjeux, reste bloqué depuis 1964. Le statu quo n'a résisté ni aux changements des présidents, ni encore moins aux gouvernements successifs. Il a connu 5 présidents et 8 gouvernements au cours de la dernière décennie. Tout porte à croire qu'il en sera à son 9e gouvernement. La suite du dossier, qui a été repris avec le gouvernement de Benflis, se fera sans ce dernier. Le 9e gouvernement se contentera certainement de gérer les affaires courantes jusqu'à la présidentielle. Autrement dit, le dossier de la Fonction publique, doit attendre le 6e président, qui, à son tour devra nommer le 10e gouvernement qui peut-être se penchera sur le dossier jusqu'à 2008. Rien ne résiste à la transition permanente.