Plusieurs chantiers encore à l'état embryonnaire attendent la nouvelle équipe gouvernementale. Homme froid et pragmatique, le nouveau Premier ministre, Ahmed Ouyahia, devra présenter incessamment son nouveau gouvernement de «coalition». Ce dernier ne devrait pas tarder à se heurter aux difficultés qui avaient paralysé l'équipe sortante. Dans de telles conditions, le gouvernement d'Ouyahia va-t-il se consacrer à résoudre les problèmes restés en suspens, comme ceux liés à la crise en Kabylie, et dans la foulée, les prochaines partielles, mais aussi ceux relatifs aux réformes économiques. Il sera aussi question de répondre aux revendications des secteurs de l'éducation, de la santé et autres. En premier lieu, l'un des plus importants problèmes auxquels il risque de faire face, très prochainement, est celui de convaincre «une majorité» FLN au sein de l'Assemblée populaire nationale. De ce fait, une crise institutionnelle n'est pas à écarter, même si le Chef du gouvernement sortant a affirmé son intention de ne pas provoquer un pareil scénario lors de sa conférence de presse animée hier, tout en relevant le poids du FLN au sein du pouvoir législatif et est donc en droit de désigner lui-même ses ministres. Mais le problème sur lequel butera réellement M.Ouyahia reste celui de l'attitude que prendra l'opinion publique. En effet, l'homme n'est pas populaire depuis l'affaire des ponctions sur salaires décidées en 1996. Sur fond de crise sociale, il aura certes du mal à faire passer son message qui se voudra beaucoup plus pédagogique que démagogique. Une pédagogie qui sera très utile lors des débats parlementaires pour éviter des amendements très onéreux ou qui remettraient en question les négociations entre le gouvernement et les syndicats. D'ailleurs à ce sujet, la Centrale syndicale, selon certaines informations, a affirmé qu'elle «préfère traiter avec Ouyahia plutôt qu'avec une autre personne. C'est un homme qui est au courant de tous les dossiers et avec qui nous discutons en toute transparence. Nous espérons seulement que la bipartite ne sera pas reportée de nouveau du fait de l'installation du nouveau gouvernement». La suite à donner au projet de loi sur les hydrocarbures retiendra l'attention des observateurs de la scène politique nationale. Ouyahia a toujours clamé que le RND est contre une nouvelle loi sur les hydrocarbures, qualifiée «d'antinationale» par l'Ugta. Voilà un sujet brûlant que Ouyahia devra prendre avec des pincettes. Sur un autre plan, le nouveau Chef du gouvernement devra affronter la crise de Kabylie au plus tôt au risque de voir la situation s'embraser davantage d'autant que certains indices laissent entendre que le mouvement citoyen n'est pas insensible aux paroles du secrétaire général du RND qui avait lancé, en février, un appel pressant pour un dénouement de la crise mettant en avant les conséquences désastreuses d'un pourrissement de la situation dans la région. Pour Ouyahia, la crise, qui prévaut en Kabylie, ne paralyse pas uniquement une région du pays, mais déstabilise l'Algérie. Aussi prône-t-il un dialogue avec les représentants effectifs du mouvement citoyen. D'où, pour le nouveau Chef du gouvernement, l'urgence aujourd'hui d'un traitement spécial du dossier par les hautes autorités du pays. «Le seul vrai gagnant du dialogue sera l'Algérie», avait-il déclaré. Dans le même sillage, la concorde civile devra être la base du programme du Chef du gouvernement même s'il s'est toujours opposé de manière catégorique à l'option de la réconciliation nationale prônée par Bouteflika. Cela, en sachant qu'Ouyahia a, comme l'écrasante majorité de la classe politique, fait campagne pour la concorde civile. Le gouvernement d'Ahmed Ouyahia fera-t-il d'abord dans le social ou ira-t-il dans le sens des réformes exigées par les instances internationales? Tant de questions qui ne connaîtront de réponses qu'avec la révélation de la nouvelle équipe dirigeante qui est encore au stade de la concertation.