Dix personnalités, et non des moindres, ont rendu public, hier, un communiqué à son sujet. Dix personnalités, et non des moindres, ont rendu public hier un communiqué au sujet de Ali Benhadj. En effet, l'ancien Président de la République Ahmed Ben Bella, le leader du mouvement Wafa, Ahmed Taleb Ibrahimi, Rachid Benyellés, Fateh Rebï, l'ex-SG du FLN, Abdelhamid Mehri, Abderahman Chibane, premier responsable de la coordination des zaouïas, Abdallah Djaballah, chef de file du MRN, Ali Yahia Abdenour, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, et l'ancien responsable d'Ennahda, Lahbib Adami, ainsi que le président du MSP, Mahfoud Nahnah, ont interpellé les plus hautes autorités de la République sur le sort des deux détenus les plus célèbres d'Algérie. «A la fin du mois de juin prochain, prend fin la peine d'emprisonnement à laquelle ont été condamnés les deux cheikhs Abassi Madani et Ali Benhadj par le tribunal militaire.» Dans le même communiqué, les dix personnalités n'omettent pas de rappeler qu'au moment de leur condamnation, les deux hommes activaient à la tête d'une formation politique légale. Cette précision faite, ils relèvent qu'en vertu de la loi, ils doivent «être libérés, sans avoir à subir aucune contrainte susceptible de les priver de leur liberté au même titre que tous les autres citoyens». Ahmed Taleb Ibrahimi et consorts insistent sur le fait qu'une application stricte de la loi est de nature «à permettre l'apaisement des esprits et le renouvellement de l'espoir dans le sens d'une réalisation effective de la réconciliation nationale», laquelle réconciliation est, selon les rédacteurs du communiqué, «une revendication de tout le peuple algérien». Aussi, estiment-ils que «la réaction attendue du pouvoir renseignera sur sa volonté d'édifier un Etat de droit, dans le respect de l'indépendance de la justice». Pour les dix personnalités, la libération sans condition des deux prisonniers serait un signe positif aux fins de «tourner la page des larmes et du sang». L'occasion pour les signataires du communiqué d'appeler à «la conjugaison de toutes les énergies de la nation pour permettre à l'Algérie de recouvrer sa sécurité et sa stabilité». Au-delà de l'appel lui-même, l'on relèvera que parmi les personnalités qui ont émargé au bas du communiqué, il y a de potentiels prétendants à la magistrature suprême, tels que Ahmed Taleb Ibrahimi et Abdallah Djaballah, pour ne citer que ceux qui ont figuré sur la liste des présidentiables lors de l'élection à la magistrature suprême d'avril 99. Il est en effet évident que l'appel des dix poursuit un objectif politique immédiat, à savoir la prochaine échéance électorale. La donne Benhadj est, à ce propos, un élément déterminant dans la course à la présidentielle. Les forces islamo-conservatrices mettent beaucoup d'espoirs dans l'intérêt que suscite le n°2 de l'ex-FIS auprès de l'électorat intégriste. Il est clair que pour les Djaballah et consorts, avoir la bénédiction de Ali Benhadj équivaut à s'assurer un réservoir électoral loin d'être négligeable. Les appétits islamistes sont d'autant plus aiguisés que dans le camp des nationalistes, la scission Bouteflika-Benflis est de nature à provoquer une dispersion de voix, préjudiciable au moral des troupes, mais aussi annonciatrice d'une crise majeure au sein des institutions républicaines qui, en cas de victoire du candidat islamiste, devront faire avec un Président susceptible de remettre en cause des aspects de fond de la politique suivie ces dix dernières années, voire il risque de mettre l'Algérie dans une situation peu enviable au plan international. Cela dit, la libération de Benhadj est souhaitée par certains signataires du communiqué qui, en prenant les devants, plus d'un mois avant le jour J, entendent gagner la première manche dans une campagne électorale qui s'annonce autrement plus dure que celle de 99. En effet, en s'affichant ouvertement, Djaballah et quelques autres veulent s'attirer la sympathie de la base traditionnelle de l'ex-FIS qui, disons-le, a fui l'urne depuis l'épisode des législatives avortées du 26 décembre 1991. Au jour d'aujourd'hui, les jeux sont certes loin d'être faits, mais il est clair que la dispersion de la famille nationaliste ne travaille pour aucun de ces deux candidats quasi déclarés. A ce sujet, les observateurs affirment que la libération de Ali Benhadj pourrait être bénéfique pour l'Algérie à la seule condition d'une victoire d'un candidat non islamiste à la prochaine présidentielle. «La couverture Benhadj» sauterait de fait et l'Algérie sortirait sérieusement de la zone rouge. Or, deux candidats pour glaner les voix dans le même réservoir électoral, n'est pas pour arranger les choses. Au niveau de l'électorat, on n'hésite pas à dire qu'il y a un candidat de trop.