«Où étiez-vous quand les lumières étaient éteintes...» Et que tous les voyants étaient au rouge, sommes-nous tentés d´ajouter à tous les gens qui semblent débarquer de Mars (la planète et non du 19 comme seraient enclins à le comprendre et à l´interpréter les gens à l´esprit mal tourné!) Eh oui! une découverte magistrale et capitale vient d´être faite au pays des derviches tourneurs: l´Algérie est dans un état de dépendance alimentaire alarmant! Pour une découverte, elle est d´importance! Cependant, le moindre des citoyens anonymes qui viendrait à passer à côté de l´un des ports, qui serait frappé par le carrousel des camions à fort tonnage, sortant chargés de containers tout comme il resterait contemplatif devant l´énormité des silos à grains, qui, comme des temples de Baal, gardent l´entrée du port. Les trains à céréales font tous les jours la navette entre les silos géants et les entrepôts de l´Oaic ou des grands moulins de l´intérieur du pays. On reste rêveur! On est loin du temps où l´Algérie était le grenier de Rome: céréales, vins, huiles étaient produits à profusion et exportés vers la capitale d´un empire qui exploitait chacune de ses régions d´une main de maître. L´infâme colonialisme français saura continuer la politique romaine: nourrir le peuple français avec les produits agricoles algériens. Les archives audiovisuelles sont dissertes sur ce sujet-là: des camions chargés de cageots de fruits et légumes, des tonnes de blé et d´orge, des tonnes d´alfa acheminées par des trains spéciaux, des montagnes de minerai de toutes sortes sont tous les jours absorbées par les ventres proéminents de navires avides. Et pendant plus d´un siècle, le manège a perduré! Il faut s´interroger sur les profondes causes qui ont conduit le peuple algérien à une forte dépendance technologique et alimentaire. On peut citer dans l´ordre qu´on peut ou qu´on veut bien: le colonialisme, la guerre, les domaines autogérés, les nationalisations, les diverses réformes et restructurations, la révolution agraire, la mauvaise gestion, le bétonnage sans frein des terres agricoles, la toute-puissance de la mafia politico-financière et celle du foncier, la course vers les marchés avec l´étranger... On peut, évidemment, d´un autre côté, pour dédouaner les responsables politiques, condamner le laisser-aller, la négligence, la paresse des autochtones...mais on ne peut pas tout mettre sur le dos du gouvernement qui vient de partir et qui ressemble comme deux gouttes de la même eau au précédent comme à celui qui suit ou à celui qui leur succèdera. Il n´est pas toujours trop tard de dénoncer les insuffisances d´un Exécutif ou d´un régime, mais peut-on le faire quand on fait longtemps partie du système et quand a été de quart au gouvernail. Quand on dit: «Au boulot!», beaucoup, hélas, comprennent: «A table!»