Rares de nos jours les magistrats qui envoient les sniffeurs en cure. Ici, l´avocat a bien expliqué!... Maâmar L. est un jeune inculpé d´usage de stups qui se présente devant la présidente de la section correctionnelle. Il arrive du box, mais, alors dans un état second car il va tenter de prononcer des bribes de mots en répondant à cette terrible magistrate qui n´est jamais tendre avec ceux qui «l´ont fait», et tenté de contourner la loi en proférant des mensonges nommés sans honte: réponses. Déjà et comme il ne manque jamais de le faire, Maître Benouadah Lamouri, son avocat se tient le menton. «Alors inculpé, vous bossez?», demande en clignant des yeux la ravissante présidente qui fixe la paire d´yeux embués du détenu qui tient assurément difficilement debout. «Bon! à vous voir dans cet état, vous n´êtes pas en mesure d´être jugé» tranche presque Madame la juge visiblement préoccupée par la mine de Maâmar qui fait «non» de la tête avant d´ajouter avec beaucoup de difficultés devant Maître Lamouri: «Non, je vais bien», en regardant vers son avocat qui en a vu d´autres. Et puis miracle! Le détenu réussit à aligner sans ponctuation trois mots: «J´étais militaire» mâchonne-t-il, la main dans ses cheveux, avant qu´il ne soit sommé magistralement par le bien-nommé, ambitieux et jeune procureur, de donner le métier qu´il exerçait au moment où il avait été interpellé en flagrant délit de «sniff». J´exerce dans un...il hésite et dit en murmurant Maâmar: «Centre de rééducation», les lèvres sèches serrées et bleues. «Quoi?», s´exclame la présidente plutôt étonnée que scandalisée, et ce, même si elle a sous les yeux le dossier: «C´est bizarre, c´est la première fois, que j´entends parler d´un poste pareil accordé facilement dans un centre de rééducation! Vous êtes bien Maâmar? C´ est sûr». L´inculpé ira plus loin car le parquetier l´avait, dans la foulée, sommé de bien articuler en répondant et de cesser de balbutier faux...«On m´a arrêté avec une boîte de cachets psychotropes qui me donnent le bien-être et me relèvent et je suis...». Maâmar n´ira pas plus loin, la juge venait de l´interrompre car elle venait de saisir à qui elle avait affaire: un malade sans espoir de guérison et il est certain que le détenu qui a un casier très chargé ne pourra revenir sur «terre» qu´en se soignant. Et ce sera le cheval de bataille du défenseur qui adore défendre quelqu´un dans l´embrouille. Il a cet art et il lui appartient! Monsieur le procureur est prié de requérir. Il le fera non pas dans le sens souhaité par le détenu qui venait de mettre en exergue son statut de malade. «Huit mois de prison ferme et la saisie des cachets.» L´ inculpé ne ressent plus rien. Il est «out». Visiblement, cet énergumène qui a vraiment une tête- ô comble- de victime de la société, paraît en état de manque flagrant. Il ne suivra même pas la brève mais percutante plaidoirie de cet avocat brun qui va plutôt tirer les arguments favorables à son client et ce, depuis la loi relative à la prévention et à la répression de l´usage et du trafic illicites de stupéfiants et de substances psychotropes, cette loi 04-18 du 25 décembre 2004, loi «papa Noël», nommée ainsi par dérision par certains avocats à l´humour étalé. Et pour ce faire, Maître Lamouri va vite aborder le chapitre «II» relatif aux dispositions préventives et curatives, notamment son article «huit» dont les termes évoquent que «la juridiction compétente peut astreindre les personnes désignées à l´article 7 à subir une cure de désintoxication, en confirmant l´ordonnance visée dans le même article ci-dessus ou en prolongeant ses effets. Les décisions de la juridiction compétente sont exécutoires malgré l´opposition ou l´appel. Lorsqu´il a été fait application de l´alinéa premier de l´article 8 ci-dessus, la juridiction compétente peut ne pas prononcer les peines prévues par l´article 12 de la présente loi». Il ne restera donc plus à la présidente qu´à prendre ses responsabilités en décidant, après une courte mise en examen du dossier, d´envoyer l´inculpé non pas en taule mais aux soins, les bons! C´est peut-être une bonne décision mais combien de «Maâmar» circulent dans le périmètre des drogués? N´empêche que ce verdict aura fait des heureux: l´avocat et les proches du...malade et c´est tant mieux, car pour une fois, la raison l´a emporté sur son ennemi: la répression - et c´est ce qui fera dire à Maître Benouadah Lamouri que Si Montaigne, cet écrivain du XVIe siècle a dit: «L´homme est impuissant à trouver la vérité et la justice», moi je dis: «Une justice sans âme n´est qu´errance en campagne.» Quelle culture, Maître! et c´est plus que flatteur....