La mafia, c´est connu, ne frappe que ceux qui s´y frottent. Chez nous, on n´admet pas le terme... Voilà une consoeur qui reprend les propos d´une victime d´escroquerie. Cette même victime parle de la mafia du foncier. Des présumées se sentent visées. L´une d´elles dépose plainte. Pour diffamation, fait prévu et puni par les articles 296 et 298 du Code pénal. Les deux inculpés: celui qui a prononcé le concept «mafia» du foncier et la consoeur qui l´avait requis dans son article répondent au tribunal. Et ce mardi, il y a cette Selma Bedri comme juge du siège. Et Bedri refuse d´avaler des couleuvres. Elle a prêté serment d´obéir à la loi. Et elle le fait depuis près de quatre années judiciaires. Sans l´avouer, elle adore la jurisprudence, mais pour le moment, ses aînés et son entourage lui avaient conseillé de ne pas trop rêver, car chez nous, la recherche et l´initiative, c´est... La diffamation est un délit très mal «couvert» par la loi. Deux articles seulement l´évoquent dans le Code pénal. Même la jurisprudence des magistrats des années 70-90 tels les Mohamed Hamache, Zineb Younsi, Djillali Hamani, Kamel Benchaouch, Fodil Laïch, Mohammed El Hadi, Hamid Bacha, les regrettés juges Benyoussef Abdelkader, Mohammed Sedik Gantri, Saïd, Abdellah Taïr, avaient, en leur temps, fait dans la jurisprudence, mais la tutelle restera sourde, muette, aphone, impuissante à les relever et à les introduire. Dommage! En 2010, la diffamation fait de certains juges du siège de véritables victimes de l´aridité du champ des lois à appliquer à ce délit, avec de la mesure. A El Harrach, Maître Benouadah Lamouri a balancé à la face des deux très jeunes magistrats, Selma Bedri, la présidente et Faïza Mousrati, la représentante du ministère public de l´audience du mardi, la frustration et l´impuissance de la justice à examiner convenablement la diffamation. Une journaliste écrit un papier. La rédaction trouve le titre. On l´imprime. Des lecteurs se sentent visés alors que ni les articles 296-298 du Code pénal ni la jurisprudence qui existe ne prévoient les poursuites du jour. Et ces poursuites reposent sur une expression usitée à l´emporte-pièce: «La mafia du foncier». A un moment donné de notre jeune histoire, il y a eu ce concept qui avait galvanisé les foules: «La mafia politico-financière» et personne n´avait été poursuivi alors que c´était l´époque d´un acharnement judiciaire sans précédent. La presse, à l´époque, dénonçait et le parquet était là aussi usant et abusant de l´opportunité des poursuites jusqu´à un point de non-retour qui avait fait que certains juges du siège chargés de «punir» les auteurs de délits de presse à...abuser de verdicts «blancs» car certains journalistes supposés être coupables de diffamation avaient été condamnés à une peine assortie du sursis à...huit reprises! Ce qui est fondamentalement ridicule, car la loi prévoit un sursis et en cas de récidive, c´est «le ferme» qui est là. Entre-temps, il y eut un essoufflement dans chaque «camp». Et le mot diffamation avait commencé par être remis à sa place. Et dans cette affaire, Bedri avait pris la résolution de farfouiller en vue de considérer le concept «mafia politico-financière» créé par le regretté Mohammed Boudiaf qui avait, en son temps, su lancer cette mise en garde en direction de ceux qui ne voulaient pas du changement du 5 octobre 1988, cette date qui, un jour, avait changé les choses malgré toutes les résistances. Alors, le temps de réfléchir, la présidente décide de renvoyer le procès sous quinzaine. Rendez-vous le 9 du mois.