La politisation de la colère des citoyens relève d'une démarche électoraliste, dont l'objectif est de mettre le chef de l'Etat en difficulté. Les structures de l'Etat ont, encore une fois montré leurs limites dans la prise en charge des sinistrés. Les citoyens de Boumerdès ont bruyamment signifié cet état de fait au Président de la République. Pareilles scènes se produisent dans tous les pays, même développés. Chirac et Bush ont été hués par leurs concitoyens. Mais chez nous, ce qui doit être interprété comme une expression de la liberté du peuple à interpeller son Président, est monté en affaire d'une extrême importance pour réclamer la démission du chef de l'Etat. Cela s'est passé trois jours à peine après le tremblement de terre. Les charognards de la politique attendaient avec impatience une sortie sur le terrain du chef de l'Etat pour le rendre responsable du malheur des Algériens de Boumerdès et de Zemmouri. Accusant Bouteflika de visite électoraliste, certains titres de presse n'en ont pas moins eu une attitude politicienne de bas étage. Il est évident que la politisation de la colère des citoyens, somme toute compréhensible, relève d'une démarche, elle-même, éminemment électoraliste, dont l'objectif n'est autre que de mettre Bouteflika en difficulté à quelques mois de la prochaine élection présidentielle. Une manière de faire déjà «expérimentée» lors de la grande crise de pénurie d'eau qui a frappé l'Algérie l'année dernière. On l'a aussi constaté avec les inondations de Bab El-Oued où le mécontentement des sinistrés a été instrumentalisé à outrance, dans l'espoir de voir le quartier mythique d'Alger se soulever contre l'autorité centrale. A croire que les opposants au chef de l'Etat, tapis dans l'ombre, se réjouissent lorsqu'un événement dramatique frappe l'Algérie. C'est l'occasion de commercer avec la vie des Algériens et de monter les scénarios les plus invraisemblables, histoire de récupérer la douleur des citoyens meurtris dans leur chair. Que des Algériens demandent des comptes au premier magistrat du pays est une chose, mais de là à réclamer sa démission dans un moment aussi crucial de la vie de la nation, relève de l'inconscience politique. Seulement, les officines politiques qui tirent les ficelles de ces journaux n'ont rien à faire du nationalisme et encore moins de l'intérêt de ce peuple. Ce qui importe à leurs yeux, c'est le pouvoir, sans plus. Sous d'autres cieux, notamment les démocraties avancées qu'ils n'hésitent pas à citer en exemple, en cas de catastrophe nationale, tous les acteurs politiques mettent de côté les sensibilités politiques des uns et des autres, pour se consacrer ensemble à soulager la douleur du peuple. Les exemples ne manquent pas, l'on a vu l'Amérique entière soutenir son président après les attentats du World Trade Center, on a également constaté une France unie lors des très graves inondations qui ont secoué ce pays il y a deux ans. Or, il semble que l'Algérie fait exception à cette règle démocratique. Tout est bon pour abattre son adversaire, même s'il faut pour cela piétiner des milliers de cadavres. On en vient, dans certains salons algérois, à souhaiter un maximum de catastrophes à ce pays avec un minimum d'organisation dans les secours pour taper sur le Président de la République. D'ailleurs, dans ces milieux, on rit déjà sous cape, sachant que le séisme de Boumerdès ralentira considérablement l'effort colossal consenti par les pouvoirs publics pour régler le problème du logement. En effet, le relogement des populations sinistrées se fera au détriment des programmes de logements sociaux programmés pour cette année. Les détracteurs de Bouteflika espèrent un fin de mandat en queue de poisson à cause des grandes dépenses nécessaires générées par le tremblement de terre, qui viendront, selon toute vraisemblance, annuler le nouveau plan de relance économique programmé pour la prochaine rentrée sociale. En fait, les anti-Bouteflika fourbissent leurs armes et passent à la vitesse supérieure en exploitant la douleur de l'Algérie. Mais comme pour l'épisode de Bab El-Oued, il est clair que les Algériens sauront faire la différence et ne verseront pas dans l'émeute inutile, comme souhaité par ces «journaux-lance-flammes».