Les actions de résistance se multiplient au moment où la polémique sur les armes prohibées irakiennes prend de l'ampleur. Ces derniers jours ont été marqués par la montée de la violence dans différentes villes irakiennes où des groupes armées s'attaquent de front aux forces de la coalition. Les attentats (jeudi) à Falloujah, au nord de Bagdad, ont occasionné la mort de trois militaires américains, en blessant sept autres. Au moment où les Américains assistent à la multiplication des actes de résistances, aux Nations unies le chef des inspecteurs de la mission de vérification, de contrôle et d'inspections de l'ONU (Cocovinu), Hans Blix, remettait son dernier rapport - avant le terme de sa mission prévue à la fin de ce mois - dans lequel il faisait part de ses doutes quant à l'existence d'armes de destruction massive en Irak. Dans une déclaration à la presse, à l'issue de sa réunion avec le Conseil de sécurité, M.Blix est revenu sur ses doutes singulièrement sur le fait que les forces occupantes se chargent elles-mêmes des recherches. Le diplomate suédois s'est ainsi notamment interrogé sur la crédibilité des équipes de recherche américaine et britannique expliquant que toute découverte d'armes prohibées devait être faite par des experts indépendants, indiquant: «Quelqu'un qui travaille dans le cadre d'une armée d'occupation ne peut pas avoir la même crédibilité qu'un inspecteur indépendant», affirmant toutefois ne pas «remettre en cause l'intégrité ou le professionnalisme des forces de la coalition». Le problème est que, plus le temps passe, plus les éventuelles découvertes d'ADM irakiennes seraient frappées de suspicion. En vérité, le temps ne travaille pas en faveur de la coalition américano-britannique qui espérait mettre immédiatement la main sur des armes de destruction massive, lesquelles vraisemblablement n'existent pas ou, plus certainement, n'existent plus, car détruites lors de la première période de recherche de l'Unscom après la deuxième guerre du Golfe (1991-1998). Mais le feuilleton sur les ADM est loin d'être fini. Notons par ailleurs l'arrivée à Bagdad d'une équipe de l'Aiea (Agence internationale de l'énergie atomique) qui doit entreprendre des vérifications sur les matériaux radioactifs, stockés dans le dépôt nucléaire d'Al-Tuwaïtha, pour essayer de déterminer s'ils n'ont pas été pillés après la chute de Saddam Hussein. Au plan politique une certaine éclaircie s'est réalisée dans les discussions sur l'organisation d'un gouvernement intérimaire après une rencontre élargie aux formations politiques autres que celle composant le Conseil des sept, de l'ex-opposition, avec l'administrateur en chef, Paul Bremer. Les choses ne semblaient pas aussi évidentes, jeudi, après l'annonce par l'administrateur américain de l'élargissement du dialogue à d'autres forces et formations politiques irakiennes. En fait, le différend concernait plus particulièrement les prérogatives et attributions du futur gouvernement intérimaire, que les Américains voyaient plutôt se concentrer sur la rédaction de la nouvelle Constitution. Ce qui n'était pas l'avis de l'ex-opposition qui demandait à jouer un rôle plus grand dans le retour à la stabilité et à la normalité. Selon un porte-parole du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), Hoshyar Zebari, des «progrès» ont été réalisés: «Pour la première fois, (les Américains) admettent que le Conseil politique aura les prérogatives de nommer des ministres intérimaires, et non des conseillers, de présenter des projets et de représenter l'Irak dans certaines instances (régionales et internationales).» Lors de cette réunion, à laquelle prirent part des formations politiques ne faisant pas partie du Conseil des sept, un tour d'horizon a été fait sur la situation en Irak avec la confirmation par l'administrateur américain, Paul Bremer, de la formation du gouvernement intérimaire d'ici à la mi-juillet. Toutefois, les attentats contre les forces américano-britanniques d'occupation, la polémique autour des ADM qui s'amplifie de jour en jour, ont quelque peu relativisé la confiance des Etats-Unis et mis en arrière-plan l'aspect purement politique du dossier irakien et de la réorganisation du pays après la chute du régime de Saddam Hussein. Il est patent qu'un malaise, allant grandissant, entoure les introuvables armes de destruction massive irakiennes. Les nombreuses agences de renseignement américaines ont beau affirmer leur conviction dans l'existence de telles armes, elles n'ont pu jusqu'ici en apporter la moindre preuve ou justification, ni réussir à localiser des unités de production qui ne peuvent pas ne pas être cernées, même dans un pays aussi vaste que l'Irak. Vrai «casse-tête» chinois, les ADM mettent à mal les chefs de file américains et britanniques, notamment Tony Blair sommé par son opinion publique de s'expliquer. Le programme d'armement irakien qui suscita et justifia la guerre demeure, plusieurs semaines après la chute de Saddam Hussein, un mystère absolu.