Les attaques contre les forces d'occupation américano-britanniques se sont multipliées ces dernières semaines. Peu à peu, les coalisés se pénètrent de la réalité irakienne où ils font de plus en plus face à une résistance que le général David McKiernan, à Bagdad, n'a pas hésité à qualifier «d'organisée». Vingt-sept personnes sont mortes à Balad, au nord de l'Irak, lors d'affrontements, hier, avec les forces d'occupation. Hier toujours, de fortes explosions ont endommagé un oléoduc dans la même région qui a vu des combats irakiens et américains. Depuis le 1er mai, date à laquelle le président Bush avait annoncé la fin des principaux combats en Irak, de nombreuses actions de la résistance irakienne, de mieux en mieux organisée - qui ont occasionné la mort de nombreux soldats américains et britanniques - sont venues tempérer la satisfaction affichée par les responsables américains au lendemain de la chute du régime de Saddam Hussein. Que celui-ci soit mort, ou toujours vivant, importe peu, apparemment, pour ceux qui ont décidé de combattre l'occupation américano-britannique. En fait, après une courte période de flottement, les choses ont tendance à évoluer a contrario de ce qu'en attendaient les coalisés, venus en Irak en libérateurs et confrontés aujourd'hui à une farouche résistance. Dans la région de Makhoul où un oléoduc a été incendié, les habitants sont catégoriques, ils ne veulent pas des Américains chez eux. «Les Irakiens ne changeront pas», a indiqué l'un d'entre eux, affirmant: «Si Saddam disparaît, il y en aura 20 autres qui vont émerger tous les jours.» Bref, la coalition n'est guère la bienvenue. Notons que l'oléoduc a été endommagé par des explosions au lendemain même de la signature, jeudi, du premier contrat irakien d'exportation de pétrole depuis la chute de Saddam Hussein. L'oléoduc, affirment des témoins, a été «sauté» pour «empêcher les Américains d'écouler le pétrole vers la Turquie». C'est dire que les choses se compliquent chaque jour davantage pour la coalition qui a annoncé hier l'arrestation de 400 Irakiens soupçonnés d'appartenance à des groupes «terroristes». Par ailleurs, l'administrateur en chef américain, Paul Bremer, a affirmé, jeudi, que la moitié des 55 dirigeants irakiens recherchés a été arrêtée ou s'est rendue. Alors que chaque jour qui passe fait découvrir aux occupants américano-britanniques les difficultés de la tâche de «pacification» de l'Irak, la polémique sur les armes de destruction massive continue de prendre de l'ampleur. Et c'est le chef des inspecteurs de l'ONU, un diplomate chevronné de 75 ans, le Suédois Hans Blix, qui met les pieds dans le plat en traitant, crûment, des responsables de l'Administration américaine de «salopards». Il faut croire qu'il en avait gros sur le coeur pour en arriver à égratigner ses obligations de réserve. Notons que M.Blix sera libre de son engagement avec l'ONU à la fin du mois. Le quotidien de Londres, The Guardian, a indiqué, que M.Blix avait «ses détracteurs à Washington», le chef des inspecteurs affirmant: «Il y a des salopards qui se sont répandus à gauche et à droite et, qui, naturellement, ont distillé des choses ignobles contre moi dans les médias.» Hans Blix soulignera notamment que l'Administration américaine «faisait pression» sur lui pour l'amener à «incriminer l'Irak» dans son rapport au Conseil de sécurité en vue d'obtenir le feu vert de l'ONU pour le déclenchement de la guerre. Dans un autre entretien à la BBC, le chef des inspecteurs de l'ONU indique que «seulement dans trois cas les informations fournies par les services de renseignement britannique et américain avaient permis de trouver quelque chose et dans aucun des cas il s'agissait d'armes de destruction massive», affirmant: «J'ai été choqué, je dois dire», indiquant «avoir alors pensé ‘‘Mon Dieu si c'est cela ce qu'ils ont de mieux et nous ne trouvons rien, que peut bien être le reste''». Le fait aujourd'hui avéré est que les Etats-Unis ont pris la responsabilité de la guerre contre l'Irak dans l'illégalité la plus totale, quand seule l'existence d'ADM prouvée, d'une part, le refus de l'Irak de se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité afférentes à leur destruction d'autre part, pouvaient, éventuellement, donner lieu à la prise en compte de l'article VII de la Charte de l'ONU qui avalise une intervention militaire contre un pays souverain. A l'évidence, l'affaire des armes de destruction massive est loin d'avoir fait connaître ses tenants et ses aboutissants ni livré tous ses secrets.