On peut dire de Slimane Belharet qu'il s'agit d'un homme qui fait feu de tout bois bien qu'il y ait des domaines où il excelle mieux. Par exemple, sa verve poétique est vivace. En tant qu'animateur, il est plutôt versé dans l'humour. Enseignant d'arabe au mythique lycée Amirouche de Tizi Ouzou, Slimane Belharet écrit des poèmes en tamazight, anime en français et en kabyle et s'exprime dans les trois langues quand il s'agit de conversations avec des amis. Dans cet entretien, il revient sur ses différentes activités réfutant notre commentaire comme quoi, c'est un homme de culture qui est à la fois, partout et nulle part. L'Expression: Vous êtes poète, animateur, commentateur, comédien, réalisateur et auteur. Comment peut-on concilier autant d'activités en même temps sans donner l'impression d'être partout et nulle part? Slimane Belharet: Je suis enseignant de lycée, là c'est mon gagne-pain. D'ailleurs, l'enseignement est une passion pour moi. Quant au domaine artistique, il me procure du plaisir au point que je ne peux plus m'en passer. Depuis mon jeune âge, je m'intéresse à tout ce qui est en rapport avec l'art en général. J'aime toutes les disciplines, pratiquement. La nuit, je m'adonne à la poésie. Je traite dans mes textes tous les sujets qui me viennent en tête, sans tabous. L'animation, c'est ma passion préférée. Ces derniers temps, j'ai un peu délaissé la scène car je collabore régulièrement aux chaînes de télévision berbères et cette activité me prend du temps. On n'entend plus votre voix à la Radio kabyle Chaîne II, pourquoi? J'ai animé l'émission «Yella waya, yella wayen yugaren aya» pendant sept ans. En septembre 2007, après la pause d'été, je me suis présenté comme d'habitude à la radio et j'ai été stupéfait de découvrir que mon émission a été tout simplement supprimée de la grille. La suspension de mon émission avait été faite sans aucune explication. Pourtant, l'émission, qui était diffusée les vendredis en fin d'après-midi était très écoutée. Je considère la suspension de mon émission sans raison comme un acte arbitraire. Heureusement qu'il y a d'autres brèches qui me permettent de m'exprimer car je ne peux pas me passer des activités culturelles. Avec le lancement de radio Djurdjura de Tizi Ouzou, comptez-vous renouer avec le micro? J'ai grand espoir de renouer avec l'animation radio dans le cadre de radio Djurdjura que nous attendons avec impatience. Mon souhait est de pouvoir y animer les tranches matinales. Dans d'autres créneaux vous vous êtes illustré par plusieurs participations notamment au Festival du film amazigh, parlez-nous un peu de ce volet... J'ai participé à trois reprises au Festival du film amazigh avec des reportages. A l'édition de Sétif, j'ai contribué avec un documentaire sur les agents d'entretien des hommes dont on a tendance à minimiser le rôle capital dans la société, puis avec un produit sur le conflit de génération et enfin, à Azeffoun, je me suis présenté avec un travail audiovisuel sur les prénoms berbères et j'ai été sélectionné dans le cadre du panorama amazigh. En tant que poète, vous avez également des productions... Oui, j'ai édité au total trois albums dont «Tajmilt i yemma», «I kem ayemma» ainsi que «Isefra mebla tilès» qui sortira bientôt. Il s'agit de quatorze poèmes nouveaux mais qui sont déclamés s'une traite comme un même poème. Vous êtes également auteur de livres, qu'avez-vous publié jusque-là? J'ai édité deux livres satiriques en langue arabe, un manuel pour les élèves de terminale et j'ai un recueil de textes satiriques inédit en langue française. On retrouve chez vous une facilité peu fréquente chez nous, de passer d'une langue à l'autre aisément. Pourquoi ce choix de la diversité linguistique? Il y a des oeuvres en langue arabe qui m'inspirent énormément. Je m'en inspire pour enrichir mes poèmes écrits en tamazight. C'est une sorte d'adaptation. Pour moi, travailler dans plusieurs langues est une richesse et tamazight a besoin des autres langues pour être promue. Vous avez animé, hier, votre dernière rencontre de la saison dans le cadre de «Parole aux artistes» en invitant le grand Medjahed Hamid. Pouvez-vous faire le point sur cette activité culturelle mensuelle? Au total, j'ai invité une cinquantaine d'artistes depuis que j'ai lancé l'émission «Parole aux artistes», à la Maison de la culture de Tizi Ouzou. Jai invité de grands noms de l'art qui ont rencontré et été confrontés dans une grande convivialité au public. Je peux citer Akli Yahiatène, Farid Ferragui, Sonia, Si Moh, Brahim Tayeb, Benmohamed, Belkacem Hadjadj, Ali Mouzaoui, Hadjira Oubachir, Saïd Smail... A chaque rencontre, je trouve que le public exprime un grand engouement par rapport à ce rendez-vous. Ce qui m'encourage à aller de l'avant. «Parole aux artistes» a été suivie par d'autres initiatives louables à l'instar du «café littéraire et philosophique» de notre ami Amirouche Malek. Un dernier mot, peut-être? On ne peut pas terminer cette interview sans avoir une pensée pour Matoub Lounès dont on commémore l'anniversaire du jour de son assassinat, en ce moment. A chaque fois que je pense à Matoub Lounès, et ça m'arrive souvent, je me pose toujours cette question: est-ce qu'il y aura un jour, un artiste d'un tel niveau et un homme d'une luminosité telle que la sienne? Tous les jeunes artistes doivent le prendre pour exemple.