Le Dr Salah Mouhoubi, politologue et économiste L'économie informelle est une «bombe à retardement» pour le pays. «Il est impératif d'arrêter les diverses subventions économiques de l'Etat pour orienter les investissements vers le travail et l'innovation», tel a été l'essentiel du message transmis hier matin par le Dr Salah Mouhoubi, politologue, économiste, expert et néanmoins membre du Conseil national économique et social (Cnes), qui a dispensé une conférence au Centre de presse «Algeria Invest» à Dély Ibrahim près d'Alger, événement que présidait Madame H. Amina Kadri-Messaid, enseignant chercheur au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (Cread). Ces deux facteurs économiques fondamentaux à savoir le travail et l'innovation, contenus dans une brillante analyse du Dr Mouhoubi, «peuvent renverser la néfaste tendance de la pratique de l'informel. En luttant contre ce fléau qui accapare pas moins de 40% de l'économie nationale, une certaine transparence peut être perçue.» Supprimer l'informel permettrait de «réorganiser l'économie nationale en ciblant des secteurs précis comme la recherche scientifique ou l'éducation», a estimé Mouhoubi lequel a regretté qu'il n'y ait «pas de statistiques très fiables, notamment dans le domaine de l'agriculture.» A une question relative aux ressources dont dispose l'Algérie, tant en minerais qu'en énergie, serein, le conférencier a répondu, qu' «avoir toutes les ressources de la planète, ne suffit point à booster l'économie du pays, si en face, ne se concrétisent pas les efforts nécessaires pour écarter «une mauvaise gestion» des ressources en question, en particulier, et de l'économie en général. Dans sa riche présentation, le conférencier a lancé la boutade de «l'inexistence d'un ministère des Finances mais plutôt l'existence d'un ministère de la dépense» tout en brandissant la menace d'un pays qui s'engage actuellement dans «une voie suicidaire.» L'économiste estime nécessaire un débat national pour le changement avec comme suite de sérieux «sacrifices». Un participant au Forum a mis le doigt sur la pratique de la politique de subvention par «ceux qui veulent rester en place dans l'écheveau du pouvoir.» Mouhoubi lui a répondu qu'«il faut un projet de réforme économique échafaudée par une nouvelle classe politique...Car, a-t-il dit, on n'entre pas dans la globalisation et la mondialisation avec une mentalité formatée par une pensée économique dirigée.» Mouhoubi a préconisé «un consensus national lequel peut aboutir à des changements après de larges débats sur ce point.» Pour ce faire, il notera que «l'Etat doit afficher clairement les ambitions de sa politique économique.» Il se questionnera sur l'existence d'une stratégie dans notre politique agricole avant de souligner qu' «il vaut mieux subventionner l'économie nationale qui, a-t-il rappelé, est une économie progressive, ce, au lieu de subventionner indirectement un producteur étranger à travers les importations de produits finis...En effet, il faut avancer progressivement dans l'autoroute de l'économie productive.» Le Dr Mouhoubi a regretté en outre que la stratégie agricole algérienne se soit «essoufflée» depuis de nombreuses années. Pour preuve, il citera de regrettables faits comme «l'agression du béton qui a envahi la riche plaine de la Mitidja». Le conférencier s'est par ailleurs, questionné si l'Etat disposait d'un système de régulation pour la distribution de la production agricole. A ce propos, il a montré du doigt les camionnettes qui sillonnent les villes et campagnes pour écouler des produits qui devraient être, comme pour «la pomme de terre normalement, calibrée et mieux présentée au consommateur». Il a d'ailleurs, lancé un appel aux autorités concernées, le ministère du Commerce en l'occurrence, «pour que cesse ce cinéma» humiliant à la limite. Mouhoubi avait rappelé il y a quelque temps que «la politique sociale a coûté pour cette même année 1000 milliards de dinars, soit 30% du budget de fonctionnement». Dans cette subvention, sont comprises les interventions directes et indirectes de l'Etat dans plusieurs secteurs, tels que l'électricité, l'eau, le gaz, la santé, l'enseignement supérieur, les caisses de sécurité sociale, etc.? Le Dr Mouhoubi a occupé différentes fonctions dans des cabinets ministériels, à la Banque d'Algérie, dans des établissements bancaires à l'étranger et à la présidence de la République comme chargé de mission.