C'est une véritable mosaïque ethnique et religieuse qui a été intronisée pour diriger le pays. L'Irak s'est dotée d'un Conseil transitoire de gouvernement, mais après? En fait, tout est là, nonobstant les déclarations rassurantes des uns, les satisfecit des autres, il reste à la nouvelle structure irakienne à faire les épreuves du terrain. D'autant plus que le soubassement ethnique et confessionnel de la composante du nouveau gouvernement n'est point une garantie de stabilité et d'homogénéité. En effet, en Irak il semble que soit repris, à grande échelle, l'expérience libanaise, basée sur la religion, qui a été loin d'avoir donné la stabilité attendue par ce pays. L'accentuation des différences ethniques et religieuses, éloigne d'autant l'avènement d'une nation irakienne fondée sur les seuls principes des droits de l'Homme et des libertés. Par ailleurs, le Conseil transitoire semble, d'ores et déjà, avoir choisi le modèle fédéral comme l'indique la première déclaration de cette nouvelle institution qui projette la formation d'un gouvernement dans le cadre «d'un Irak fédéral, démocratique et unifié». Est-il possible de créer une fédération sur une base religieuse et tribale? A moins que l'Irak ne s'achemine vers la création d'Etats à caractère ethnique et confessionnel, ce qui est pratiquement le cas dans le Kurdistan irakien, quasiment autonome, ou l'Etat que les Chiites espèrent bien créer. Il y a donc comme une sorte d'antinomie entre l'affirmation du fédéralisme et celle de la promotion de l'unité nationale, tel que le déclare le nouveau Conseil qui indique «La situation recommande le plus haut degré de coopération de la part de tous les Irakiens, en faisant prévaloir l'intérêt national et la reconstruction d'un Irak nouveau où le peuple uni bénéficiera de tous les droits dans un régime démocratique, fédéral, unifié et en sécurité avec lui-même et avec ses voisins». Toutefois, le nouveau Conseil irakien a vu le jour sous les effets d'une fausse note ou un faux pas, c'est selon, lorsqu'il déclare jour férié, le 9 avril, jour de la chute de Saddam Hussein, certes, mais surtout le jour où des forces étrangères occupèrent le pays. Un jour de fête, le jour de l'occupation du territoire national? Vraiment une première dans les anales du monde. D'autre part, il a été relevé que la majorité de la composante du Conseil transitoire est issue des exilés et de l'émigration irakien et que nombre d'entre-eux, à l'instar de Adnane Pachachi et l'imam Mohamed Bahr Al-Ouloum se trouvent déjà dans un âge respectable, quasi canonique. Alors ce Conseil transitoire est-il un Conseil des sages? Car en fait, il faudra aux membres du Conseil, beaucoup de sagesse et d'endurance pour dépasser les rancunes et les revanches pour ne penser qu'à s'atteler à la reconstruction d'un pays en pleine déliquescence. De fait, le Conseil s'est donné pour priorité «le rétablissement de la sécurité et de la stabilité et la relance de l'économie nationale» Un défi qui sera dur à relever s'il n'y a pas un minimum de coopération et une aide, sans atermoiement, de la communauté internationale. Dans une tribune publiée par le New York Time d'hier, l'administrateur en chef américain, Paul Bremer, affirme que «Le Conseil aura immédiatement un réel pouvoir politique, nommera les ministres intérimaires et travaillera avec la coalition à l'établissement d'une stratégie politique et d'un budget». Voir! Cela, d'autant plus que ce Conseil, déjà balisé, reste sous l'étroit contrôle de la coalition et, partant, n'aura pas l'indépendance voulue, ou indispensable, pour qu'il travaille dans l'unique intérêt de l'Irak.