Le gouvernement intérimaire irakien devra surmonter de périlleuses épreuves : deux élections générales, voire trois, et un ou deux référendums, avant de recouvrer, à la fin de l'année 2005 ou peut-être celle de 2006, une entière souveraineté et bénéficier d'un gouvernement démocratique. Dans le même temps, il doit venir à bout d'une résistance multiforme et dont le pan islamiste, déclarant ne pas reconnaître le processus, agréé par la communauté internationale et mis en place le 28 juin, poursuit ses attentats. D'abord, des législatives prévues fin janvier 2005 pour choisir une assemblée nationale transitoire de 275 membres, qui aura pour tâche non seulement de rédiger la constitution permanente avant le 15 août 2005, mais aussi de voter des lois et d'interpeller le gouvernement. Or, selon le rapport présenté en février par l'envoyé spécial de l'ONU, Lakhdar Brahimi, il faut huit mois pour organiser ces élections. La commission électorale a été formée et le gouvernement de la coalition drivé par le proconsul américain, Paul Bremer, avait mis au point une loi électorale avant de céder le témoin. Il s'agira d'un scrutin proportionnel avec l'Irak formant un seule circonscription. Les partis ou associations politiques devront présenter des listes d'au moins 12 noms, mais les irakiens peuvent se présenter individuellement. Chaque formation ou simple candidat devront présenter une liste de soutien de 500 signatures autres que celles d'électeurs. Il faudra environ 26 à 27 000 voix pour être élu, a indiqué Mme Carina Perelli, chef de la division électorale des Nations unies. Les listes électorales seront établies, non pas sur la base d'un recensement général impossible à réaliser, mais à partir de données existantes dont il faudra vérifier la fiabilité. Cette première étape est périlleuse, car la sécurité doit être assurée non seulement le jour du scrutin, mais également bien avant, pour que la campagne se déroule. Une fois l'élection terminée, les élus devront choisir le nouveau chef de l'Etat et ses deux vice-présidents et investir un nouveau gouvernement. Mais le plus dur encore sera de rédiger la constitution permanente ; ce qui est une gageure en raison de la mosaïque confessionnelle et ethnique de l'Irak. En outre, les chiites, majoritaires dans le pays, et surtout leur chef spirituel, Ali Sistani, ne veulent pas que la loi fondamentale, d'essence démocratique, adoptée le 8 mars par le Conseil de gouvernement, qui régit le pays jusqu'à la fin 2005, serve de base à la nouvelle constitution. Celle-ci doit être soumise à référendum d'ici le 15 octobre 2005. Là aussi, gît une source de conflit, car si elle doit être adoptée à la majorité simple, le scrutin est invalidé s'il a été rejeté par les deux tiers des électeurs dans au moins trois gouvernorats sur les dix-huit que comptent l'Irak. Une fleur faite aux kurdes, qui sont majoritaires dans trois départements du nord. En cas de rejet, une nouvelle élection doit avoir lieu au plus tard le 15 décembre 2005 pour désigner une nouvelle assemblée nationale transitoire qui devra réécrire la constitution durant une période ne dépassant pas un an. Si, au contraire, elle est adoptée, les élections générales auront lieu avant le 15 décembre 2005 et le gouvernement permanent mis en place fin 2005. À cette date, si rien ne vient bloquer le processus, l'Irak aura recouvré son entière souveraineté et jouira, pour la première fois de son histoire, d'un gouvernement issu d'un processus démocratique. Ça, c'est la feuille de route. Reste la faisabilité du processus qui dépend des nouvelles autorités, des Etats-Unis, de la communauté internationale et des irakiens. D. B.