Le «présidentiable» Ouyahia sait surfer sur les vagues hostiles et attendre son heure. Il est au moins deux motifs qui incitent à faire attention au retour en force du RND. Le premier est que - on arrive presque à l'oublier - Ahmed Ouyahia, secrétaire général du parti, est le chef du gouvernement, le second du staff Bouteflika et l'homme de confiance de certains cercles militaires très influents. Le second est celui-ci: le RND est en train de dire clairement qu'il soutient le Président de la République. Cette tendance est d'autant plus évidente qu'elle semble être concrétisée sur le terrain même. Partout où le Président est passé dans les wilayas visitées - ou qu'il devra visiter - ordre a été donné à la base RND de soutenir les pérégrinations estivales de Bouteflika. Miloud Chorfi, le porte-parole et président de la commission parlementaire l'a clairement laissé entendre en fin de la dernière semaine à Mascara, que le Président visitera dans quelques jours. Evidemment, cette tendance est encouragée par le clash survenu entre le Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, «pur produit» du FLN, et Ali Benflis, ancien Chef du gouvernement et actuel secrétaire général du FLN. Les tentatives de déstabiliser le parti et contraindre, de ce fait, son secrétaire général à partir ont eu l'effet contraire, et Ali Benflis s'est vu entouré d'un vaste mouvement de sympathie, en usant de son rôle d'homme visé par les «grenouillages» du pouvoir. En fait, le problème ne réside pas là, mais dans cette volonté entretenue de redevenir un parti présidentiel, un parti du pouvoir, sinon le pouvoir lui-même. Deuxième parti après le FLN, le RND peut profiter de la situation de «cassure» actuelle pour revenir à 1997, année où, à peine né, il remporte les élections locales et de wilayas, puis les législatives, pour devenir le «noyau politique» du pouvoir. Ce rêve entretenu depuis, a été ébranlé en 2002 avec le retour en force du FLN, qui, lui aussi, a profité du discrédit jeté sur l'opposition politique réelle. Le RND qui s'était réjoui de la création de GLD, milices antiterroristes qui ont été éclaboussés par de graves et sanglantes dérives, fait de l'anti-islamisme son cheval de bataille. Or, il y a lieu de trouver là un autre point d'importance dans l'évaluation du retour du RND, car il peut générer des dérives politiques cette fois-ci. Le dernier combat de Mahfoud Nahnah, le leader du MSP - parti islamiste modéré - c'était, justement, de dénoncer les dérives de Ouyahia, nouvellement promu Chef du gouvernement. Aujourd'hui, c'est Abdellah Djaballah, le leader d'El-Islah qui prend le relais pour dénoncer les velléités d'hégémonie de Ouyahia, qui, dans le même temps, dirige un parti dont les prétentions et les positions politiques sont à ce point connues pour inspirer une quelconque sérénité chez les islamistes. Qualifié de «militaire en tenue civile», Ouyahia est encore délicatement entretenu par les mêmes cercles qui l'ont fait, qui l'ont appuyé, et qui lui réservent encore un avenir pour la République... La prochaine élection présidentielle de 2004 va se poser comme une autre chance inespérée pour le RND et caresser son vieux rêve de retrouver sa vocation de parti du et au pouvoir, vocation pour laquelle il a été conçu et dont il ne pourra jamais se séparer.