«La Tunisie s'est métamorphosée !» A elle seule, cette appréciation d'un citoyen de Chlef, en vacances familiales, résume l'évolution de ce pays qualifié aujourd'hui par des observateurs avertis de «petit dragon de l'Afrique». Il y a quinze ans, la Tunisie, Etat, institution, et société, était au bord de l'effondrement ; elle a failli non seulement sombrer dans un chaos à cause d'un président seul qui avait libéré le pays sans libérer l'homme, mais elle était à un jour près du totalitarisme intégriste. Pour l'histoire, il faut savoir que les intégristes tunisiens avaient programmé un coup d'Etat exactement le 8 novembre 1987. Mais l'ex-Premier ministre, en l'occurrence l'actuel président Ben Ali, sans doute très bien renseigné, les a devancés d'un jour, précisément le 7 novembre 1987, pour mettre fin «constitutionnellement» au régime de Habib Bourguiba, qu'on qualifiait de «combattant suprême» sans préciser que d'authentiques militants et patriotes tunisiens l'ont devancé au plan du sacrifice suprême, tel le grand leader et cofondateur de l'historique Union des travailleurs (Ugtt), Ferhat Hached, assassiné par la Main rouge le 5 décembre 1952, et, dont, susurre-t-on à Tunis, Bourguiba ne supportait pas trop le nom qui lui faisait ombrage. Enfin... quelques mois après le 7 novembre 1987, qualifié depuis de Changement, Ben Ali fait voter une nouvelle Constitution pour, entre autres, mettre fin à la présidence à vie, libérer les détenus «politiques» et mettre en branle une démarche de réconciliation nationale. Les opposants déclarés adoptent le pacte national, sorte de consensus autour duquel se rassemblent les partis politiques déclarés. Seuls récalcitrants, les intégristes qui maintiennent la pression et font activer, depuis, les réseaux de la désinformation et les canaux de propagande. Cible privilégiée : Ben Ali et sa belle-famille. Le président fait fi de toutes les allégations, et s'attelle dans un premier temps à revitaliser le RCD qui devient ainsi le moteur du changement. Premier objectif: redonner de la dignité au citoyen. Sans tambour, ni trompette, le président Ben Ali engage un vaste programme de développement qui concerne la construction de routes, l'électrification rurale, l'éducation, les infrastructures sanitaires...Un intérêt particulier est accordé à l'agriculture, au tourisme qui devient une véritable industrie, première source de revenus en devises. A titre d'exemple, l'année écoulée, le tourisme a rapporté 7 milliards de dollars (plus d'un milliard provenant des touristes algériens), l'équivalent des revenus de gaz pour l'Algérie. Aujourd'hui, celui qui visite Tunis, Tozeur, Douz, Bizerte ou Tataouine constate les effets de cet intérêt: le Tunisien ne survit plus, il vit ; il ne pense plus à assouvir sa faim, mais à organiser ses vacances. Le pays a complètement changé de visage, ce qui amène le Tunisien à être plus exigeant. Ainsi, ce dernier savoure le progrès en ce sens que son ambition consiste à faire de la Tunisie un pays avancé. Finie la Tunisie pays émergent ! De l'ambition à en revendre ; à tel point que le quatrième congrès du RCD a comme devise : «L'Ambition». Au palais du Kram, où se déroulent ces travaux qui prendront fin demain, l'ambiance est celles des grands jours. Les congressistes, jeunes pour la plupart, venus de toutes les régions de la Tunisie, travaillent d'arrache-pied, jusqu'à une heure très avancée de la nuit. La qualité de membre du comité central fait l'objet de grandes sollicitations. Même devant la porte de sortie, des jeunes sollicitent les participants pour voter pour untel ou untel. Les débats sont plutôt concentrés sur la République de demain, thème d'excellence qui mobilise les participants concentrés sur la rédaction des motions. Le discours d'inauguration du président Ben Ali a été très clair en ce sens. «Nul ne peut mieux que le parti, qui a fondé la République d'hier, être, aujourd'hui, le garant de la République de demain», souligne-t-il en recueillant l'adhésion bruyante des participants avant de déclarer qu'il acceptait de se porter candidat du RCD à l'élection présidentielle de 2004. La décision rejoint les partis politiques de «l'opposition» : Abderahmane Tlili, secrétaire général de l'Union démocratique unioniste rend hommage au président Ben Ali «pour les efforts qu'il ne cesse de déployer en vue de renforcer le processus démocratique pluraliste» ; Mohamed Bouchiha, SG du parti de l'Unité populaire estime que le congrès «met en relief les efforts de l'Etat dans l'instauration des principes de la démocratie, du pluralisme...». Ismaïl Boulahya, SG du Mouvement des démocrates socialistes, soulignera que «le président Ben Ali a les potentialités et l'aptitude entière à poursuivre le processus de réforme et le projet démocratique pluraliste...». En d'autres termes, le président Ben Ali est quasiment assuré du soutien de...l'opposition pour un troisième mandat. Huit commissions ont été constituées pour proposer une série de motions dont les plus attendues sont celles des affaires politiques, des affaires économiques et du développement régional. Chaque congressiste, s'il n'est pas certain d'acquérir un siège au comité central, veut revenir dans sa région avec des projets dans sa gibecière. L'objectif consiste à être au rendez-vous avec la République de demain, dont la construction est contenue dans le dixième plan qui constitue une stratégie d'étape qui s'intègre dans le cadre d'une vision prospective et à long terme du développement. Il contient un projet de société consensuel qui «reflète les ambitions et les aspirations des Tunisiens » et intervient après quinze années de réformes continues qui ont touché tous les domaines politiques, économiques et sociaux. Neuf axes composent l'orientation principale: gagner le défi de l'emploi, asseoir l'économie du savoir, etc. afin d'envisager «démocratiquement» les meilleures formules pour gagner les défis de cette nouvelle étape, qui s'inspire des résultats mis en évidence en Tunisie: taux de croissance de 5,3%, amélioration de la productivité globale, accroissement des exportations, évolution des investissements, création de milliers d'emplois, accroissement des transferts sociaux...Les principaux objectifs du schéma de développement du dixième plan comprennent la réalisation d'une croissance moyenne de 5,5% par an, la création de 380.000 nouveaux emplois, la promotion des exportations, l'assurance d'une plus grande efficacité des investissements, et ce, à travers la promotion des investissements privés dans les activités à haute valeur ajoutée et l'ouverture de certaines activités comme le transport, les télécommunications et l'enseignement supérieur à l'initiative privée. L'initiative privée? C'est bel et bien la clé qui a permis à la Tunisie de s'intégrer dans le développement. Des milliers d'accords ont été signés avec les sociétés étrangères pour la production - et non la commercialisation en Tunisie - de millions d'articles. Un exemple, celui de la production des pantalons jean, exportés directement en Europe, qui rapportent des devises considérables. Pas un seul de ces jeans n'est cédé en Tunisie. Gare aux fraudeurs ! Les services de la répression des fraudes et du contrôle des prix sont très craints; dans tous les kiosques, les cigarettes sont vendues aux prix fixés. Ni subterfuges ni pénuries. Certains appellent cela un Etat policier! Bref, rien ne plaît aux calomniateurs. Loin de nous l'idée de nous transformer en thuriféraires des autorités tunisiennes, mais il existe des vérités qu'il ne faut pas taire pour ne pas devenir complices des réseaux de désinformation qui tentent de nuire, principalement, à l'industrie touristique tunisienne afin d'affamer des milliers de travailleurs et ainsi appauvrir la Tunisie, pour se présenter comme alternative. Une démarche connue en Algérie, dont s'est distingué un certain leader en suggérant un embargo économique contre son propre pays. Mais les coalisés anti-Tunisie n'ont pas abouti à leurs fins. Les millions de touristes constatent d'eux-mêmes que ce pays est loin d'être «une prison à ciel ouvert» et que son premier responsable ne ressemble pas du tout à un dictateur. Il est, sans doute, l'un des rares leaders arabes dont la famille déambule, sans inquiétude, sur les boulevards de la capitale, insiste un confrère tunisien qui sourit lorsqu'on lui demande s'il appartient à la presse privée. Il s'empresse de répondre ainsi : «Voulez-vous avoir comme voisin un homme calme, fort et aisé, ou alors un homme malade et pauvre? Les Algériens devraient se réjouir d'avoir comme voisin la Tunisie; elle n'en récoltera que du bien.» Bien dit, sauf que notre distingué interlocuteur oublie de dire qu'avant le voisinage, il existe des liens de fraternité qui restent plus forts que tous les réseaux de déstabilisation.