Le Maroc perd la bataille diplomatique et se dit «déçu» de certains de ses soutiens extérieurs. Le Conseil de sécurité de l'ONU a finalement tranché le débat relatif à la fiabilité ou non du fameux plan Baker de règlement politique et diplomatique pour le Sahara occidental. Il a adopté avant-hier et à l'unanimité une nouvelle résolution, la 1495, à travers laquelle l'organe des Nations unies a déclaré «appuyer» ce plan de M.James Baker, l'ancien secrétaire d'Etat américain et envoyé spécial de Kofi Annan pour ce dossier. Il le qualifie aussi de «solution politique optimale reposant sur un accord entre les deux parties», le Maroc et le Front Polisario. Cette ébauche de solution est la cinquième présentée par l'ONU et prévoit que le statut définitif de l'ancienne colonie espagnole du Sahara occidental occupée militairement à partir de 1975 et annexée par la suite par le Maroc, sera décidé au plus tard d'ici à cinq ans par voie de référendum. Néanmoins, des pays prenant fait et cause pour les thèses de Rabat sur cette question notamment la France, se sont opposés à ce plan, estimant comme le Maroc, que cela reviendrait à imposer une solution au conflit. Même si, au lendemain du vote de la résolution, Paris a salué son contenu et a semblé revenir à plus de réalisme en estimant que ce dernier «n'impose pas de solution aux parties, mais les encourage à poursuivre la discussion pour parvenir à une solution politique agréée par elles». Aussi, et de l'avis des observateurs, le texte de la résolution adoptée jeudi par le Conseil de sécurité de l'ONU présidé par l'Espagne, n'en constitue pas moins un échec diplomatique autant pour le Maroc que pour ses soutiens extérieurs sur cette question. Le document onusien établit clairement l'engagement de l'organe des Nations unies en faveur de ce plan qui prévoit entre autres la création d'une autorité transitoire décentralisée et de nombreux transferts de compétence pour les Sahraouis avant l'organisation de ce très attendu référendum d'autodétermination dans un délai qui ne saurait dépasser les cinq années. La résolution a aussi prolongé le mandat de la Minurso, mission onusienne qui tente de matérialiser le référendum jusqu'au 31 octobre prochain. Il va de soi, que les réactions des différentes parties au conflit ou concernées par son évolution et ses développements n'ont pas tardé à se manifester. D'abord, le Front Polisario, qui avait déjà accepté en juillet dernier le plan Baker et s'était déclaré alors disposé à le mettre en oeuvre, a exprimé sa satisfaction «pour l'échec des tentatives marocaines visant à s'opposer aux efforts des Nations unies en vue d'une solution au conflit maroco-sahraoui sur la base de la pratique onusienne en matière de décolonisation». Une position qui a reçu l'encouragement et la satisfaction du secrétaire général de l'ONU, M.Kofi Annan en personne dans une lettre que ce dernier a adressée la semaine dernière à M.Mohamed Abdelaziz, le président de la RASD. En revanche, le Maroc, qui n' a pas cessé de gesticuler ces dernières semaines pour que le plan Baker ne passe pas, a indiqué avoir pris «bonne note» de cette nouvelle résolution et a «réitéré» ce qu'il a appelé, «ses objections majeures» sur le plan du diplomate américain. Le chef de la diplomatie marocaine, M.Mohamed Benaïssa, est même allé jusqu'à dire que son pays «était déçu par la position de Madrid sur la question du Sahara au Conseil de sécurité», l'Espagne assurant actuellement la présidence tournante de cette institution. Quant à l'Algérie, qui n'est pas partie au conflit et que le royaume chérifien voudrait entraîner dans «des négociations directes», (on ne sait sur quoi), elle a exprimé sa satisfaction après l'adoption de cette résolution. En effet, autant le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, M.Abdelkader Messahel, que M.Sadek Bouguettaya, président de la commission des Affaires étrangères de l'APN, ont vu dans ce texte à la fois «une nouvelle dynamique» dans le processus de règlement de cette question et «une consécration» du droit à l'autodétermination du peuple sahraoui. Il est vrai que, pour une fois, le Conseil de sécurité donne un mandat très clair à M.Baker pour qu'il poursuive sa mission sur des bases saines et crédibles menant à une véritable décolonisation de ce territoire. Et c'est ce qui effraye le Maroc.