Divers facteurs se sont conjugués pour doper les prix du baril de brut sur la place londonienne. C'est que le prix officiel du panier de l'Opep, qui donne la moyenne des sept bruts mondiaux, a été établi à 29,07 dollars le baril jeudi, contre 28,88 dollars US mercredi, selon l'agence d'information de l'Opep, l'Opecna, ce qui est son plus haut niveau depuis la fin de la guerre en Irak. Outre l'attentat contre l'ambassade de Jordanie à Bagdad, les cours ont également été confortés par la baisse des stocks pétroliers américains. Au milieu de la matinée d'hier, cette fièvre des prix s'est traduite par une autre augmentation sur le baril, le portant à 30,26. «Les cours ont grimpé, alors que le marché de New York s'est soudainement inquiété du faible niveau des stocks pétroliers américains». Cette hausse est aussi bien le résultat de la conjoncture économique que celui de l'impact de l'attentat contre l'ambassade de Jordanie, d'autant plus que cet attentat est venu s'ajouter à plusieurs mois de perturbation et d'attaques contre les GI et les troupes de la coalition. Les actes de sabotage et de pillage, qui ont particulièrement visé les installations pétrolières, notamment la raffinerie de fioul située dans le sud de l'Irak, n'ont pas permis à l'Irak de reprendre sa place sur le marché avec sa production normale de deux millions et demi de barils par jour, et des capacités potentielles qui peuvent avoisiner celles de l'Arabie Saoudite elle-même. Pendant ce temps, le coût de la reconstruction de l'Irak est estimé à 20 milliards de dollars. Si la remise en l'état des infrastructures pétrolières et gazières nécessite une enveloppe d'environ 1,4 milliard de dollars, c'est surtout la situation sécuritaire qui constitue un handicap à la reprise. Pour le coordinateur de l'action humanitaire en Irak, Ramiro Lopez da Silva, les recettes espérées des exportations pétrolières et gazières pourront atteindre au mieux 15 milliards de dollars, les cinq milliards restants devant être débloqués par la conférence des donateurs, en octobre. Cet optimisme doit être tempéré par l'irrégularité de la production pétrolière, fortement perturbée par les coups de boutoir des partisans de Saddam et des groupes islamistes liés à Al-Qaîda, voire ceux des bandes criminelles qui profitent de l'état de confusion pour étendre leur emprise sur la société. Pour Thamer Ghadbane, responsable irakien du ministère du Pétrole, des contrats ont été signés avec douze firmes étrangères, permettant de porter l'exportation de brut à 700.000 barils par jour, mais «notre objectif est d'atteindre 1,5 million par jour début octobre, 2 millions à la fin de l'année et 2,8 en mars-avril», a-t-il précisé. D'autres facteurs ont également un impact sur l'envolée des prix du brut. Ce sont les situations au Nigeria, au Venezuela et en Indonésie. Au Nigeria, c'est une grève des camionneurs, en réaction à l'augmentation des prix des carburants, empêchant des milliers de personnes de rejoindre leur lieu de travail. Au Venezuela, la reprise des tensions politiques, sur fond de rumeurs prêtant au président Hugo Chavez l'intention d'opérer des changements au sein du gouvernement, a entraîné un recul dans la production de pétrole, alors même que l'attentat qui a frappé l'Indonésie, pays producteur, ces derniers jours a ajouté à la nervosité qui caractérise le marché.