En trois mois le Président-candidat aura déboursé une enveloppe de 6 238,6 milliards de centimes. Le président Bouteflika semble renouer, ces derniers temps, avec son exercice préféré: les bains de foule en se rendant dans plusieurs wilayas. Depuis que le président de la République a décidé de briguer un second mandat, même s'il ne s'est pas encore déclaré officiellement, en dépit d'un bilan négatif à son actif, du fait que les réformes prônées par le Président lors de son investiture n'ont jamais atteint les résultats escomptés, il a distribué une enveloppe supplémentaire de 6 238,6 milliards de centimes en trois mois de croisière l'ayant mené à travers une dizaine de wilayas du pays: Bordj Bou-Arreridj (770), Batna (840), Annaba (620), Tipaza (550), Aïn-Defla (450), Naâma (370), Mascara (525), Saïda (537), Djelfa (450), Sétif (600), Guelma (435) et El-Taref (91,6) (les chiffres sont en milliards de centimes et sont fournis par l'APS. Ndlr) sans compter la somme alléchante de 2000 milliards qu'il a promis aux archs pour avoir la paix en Kabylie. Cette enveloppe vient s'ajouter au budget déjà dégagé pour le programme de soutien à la relance économique (Prse) initié par le Président pour la période triennale 2001/2004 et doté d'une enveloppe globale de 525 milliards de dinars (7,2 milliards de dollars). Une enveloppe consommée à hauteur de 474 milliards de dinars à la fin du mois de juin dernier, selon le bilan présenté par le ministre délégué à la Relance économique, Abdelkader Khelil, lors d'une conférence-débat animée le 21 juillet passé au centre de presse d'El Moudjahid sans pour autant avoir résolu le problème du chômage ni relancé l'investissement en Algérie. Pourtant, l'emploi était l'une des priorités affichées par le gouvernement en avril 2001. L'idée de départ était simple et d'inspiration keynésienne: la forte dévaluation du dinar, en 1992, ayant laminé le pouvoir d'achat, il est indispensable de stimuler la demande intérieure et, à terme, la croissance par des investissements d'Etat. Plus concrètement, il s'agissait de lancer des grands chantiers dans des secteurs requérant une main-d'oeuvre abondante : le bâtiment, l'agriculture et les infrastructures de base. Côté financement, il suffisait, estimait-on, de piocher dans la cagnotte pétrolière, dont le montant, en 2000, était estimé à 20 milliards de dollars. Malheureusement, sur le terrain, le plan de soutien à la relance économique a beaucoup pâti d'une grave pénurie de matériaux de construction mais aussi de la lourdeur et de la lenteur des procédures de passation des marchés publics. Chose ayant fait fuir les investisseurs étrangers auxquels Bouteflika n'a jamais cessé de lancer des clins d'oeil. En effet, depuis son investiture, Bouteflika n'a pas arrêté de multiplier ce genre d'appel en direction des capitales occidentales auxquelles il veut plaire dans l'espoir d'avoir leur soutien pour un second mandat. D'ailleurs, selon un parlementaire rencontré hier à l'hémicycle de l'APN, le Président aurait effectué une centaine de voyages à l'étranger. Des voyages qui n'ont eu aucune incidence positive sur le quotidien des Algériens. Et quand on sait que l'année ouvrable est de 220 jours et qu'un voyage nécessite au moins quatre jours, il est aisé de déduire que le président de la République a passé la moitié de son mandat à l'étranger. Aujourd'hui et au vu de l'échec de ce programme, le Président a décidé d'accorder des rallonges budgétaires. En effet, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Nordine-Yazid Zerhouni, avait toujours pris le soin de déclarer devant la presse que cette décision a été prise par le président de la République. Mais Zerhouni n'a jamais précisé comment tout cet argent serait budgétisé puisqu'il est dégagé à titre supplémentaire (la loi de finances 2003 ne l'ayant pas prévu). Pour justifier cette dépense, le ministre a, en outre, souvent parlé de «crédits de paiement» à étaler jusqu'en 2005. De ce fait, le pas est vite franchi pour déduire que cette rallonge budgétaire devra servir à financer la campagne électorale du Président-candidat. En effet, nombre d'observateurs y voient le début certes prématuré, d'une campagne pour la présidentielle de 2004. Une échéance pour laquelle de hauts responsables de l'Armée algérienne ont affirmé, lors du récent colloque sur le terrorisme, «n'avoir pas de candidat». Le cas échéant, rien n'assure au président Bouteflika un second mandat, d'autant que le camp qui l'a porté à bout de bras en 1999 l'a lâché. Mais les jeux d'alliance, en prévision d'avril 2004, ne sont qu'à leurs premiers balbutiements. Rien n'indique que les retournements de veste les plus étonnants ne se produiront pas d'ici là, comme cela a souvent été le cas. Et dire que la campagne électorale n'a pas encore débuté...officiellement s'entend bien sûr!