Le chef de l'Etat français a demandé «pardon» aux rapatriés lors de son déplacement vendredi à Nice mais a, par contre, écarté toute idée de repentance envers l'Algérie. A moins de 10 jours de la célébration du 50e anniversaire de la signature des Accords d'Evian, la Guerre d'Algérie est portée au coeur de la campagne de l'élection présidentielle française. Plus de 130 années de colonisation dont la férocité envers les Algériens est minimisée par Paris. La France officielle assume, «son histoire» mais elle ne se repentira pas de ses exactions commises en Algérie et ne présentera pas d'excuses non plus. «Il y a eu des abus. Des atrocités ont été commises de part et d'autre. Ces abus, ces atrocités ont été et doivent être condamnés, mais la France ne peut pas se repentir d'avoir conduit cette guerre» a souligné une fois de plus le chef de l'Etat français dans un entretien accordé au journal Nice Matin. Du côté des deux rives de la Méditerranée, on n'a pas la même approche ni la même lecture des événements dramatiques qui ont meurtri le peuple algérien qui s'est libéré du joug colonial après avoir mené une guerre de Libération de plus de sept ans (1954-1962) contre une des armées les plus puissantes de la planète. «La France fut une puissance coloniale, c'est un fait historique. Les rapatriés et les harkis ont été les victimes de la décolonisation. C'est aussi un fait historique; chaque Français doit être conscient des souffrances qu'ils ont endurées», a déclaré Nicolas Sarkozy sur le site de Nice matin qui a mis en exergue les conditions d'accueil déplorables (en France) des supplétifs de l'armée française et des rapatriés d'Algérie. «On a parqué les harkis dans des baraquements, on a demandé aux pieds-noirs de se faire oublier et de n'embarrasser personne de leurs souvenirs. Ce que je suis venu dire, ici à Nice, c'est que les harkis comme les rapatriés incarnent une partie de la mémoire de notre pays et que cette mémoire doit être connue et qu'elle a droit au respect», a souligné le président français. Que leur disait-il trois mois avant son élection, il y a cinq ans? «À tous ceux d'entre vous qui sont revenus des colonies en ayant tout abandonné, n'emportant avec eux que leurs souvenirs de jeunesse et cette nostalgie qui ne les quittera plus jamais, je veux dire que si la France a une dette morale, c'est d'abord envers eux et que cette dette, je l'assumerai» avait-il promis dans un discours prononcé à Toulon, le 7 février 2007. Quant aux excuses, à qui devait-il les réserver? «Aux enfants des harkis qui ont servi la France, qui ont dû fuir leur pays et que la France a si mal accueillis, je veux dire que si la France doit des excuses et des réparations, c'est à eux qu'elle les doit», avait indiqué Nicolas Sarkozy. C'est désormais fait. «Les autorités françaises ne se sont pas bien comportées à l'endroit de ceux qu'elle aurait dû protéger (...) La République doit reconnaître qu'il y a eu une forme d'injustice, d'abandon. C'est fait.» a déclaré le président français lors de son déplacement vendredi à Nice. La Guerre d'Algérie s'était bel et bien invitée dans la campagne présidentielle française. Comme aujourd'hui. La teneur du discours n'a point changé. Enjeu: les voix des rapatriés d'Algérie et des harkis, fortement tentés par un vote Front national que l'actuel locataire de l'Elysée compte faire tomber dans son escarcelle. Une cagnotte sans laquelle il sera obligé de céder le fauteuil de premier magistrat de France à son redoutable concurrent socialiste qui le battrait à plate couture selon de récents sondages. Une salade franco-française, en somme, dont l'assaisonnement rappellera un goût puissamment mémorisé pour les nostalgiques de l'Algérie française. Un rêve brisé. «Parce qu'il n'était plus partagé...Les Français voyaient l'Algérie comme une province, les Algériens avaient la volonté de construire un pays», souligne Nicolas Sarkozy qui souhaite ouvrir une nouvelle page entre Paris et Alger. Un voeu qui doit passer d'abord par sa réélection...