«Le principe de l'Etat républicain fait que les institutions nationales et les autorités acceptent les critiques.» Cette phrase a été prononcée hier par le général-major, Mohamed Touati lors de sa courte intervention devant les participants à la dernière journée des rencontres parlementaires qui se sont tenues pendant trois jours au siège du Conseil de la nation et à l'Ecole militaire polytechnique de Bordj El Bahri (ex-Enita). Bien entendu, ce rappel d'un principe de démocratie moderne concerne aussi l'institution militaire qui doit également s'y plier. C'est que les plaidoyers et, partant, les controverses idéologiques n'ont pas manqué hier à ces journées d'étude du Sénat sur la défense et la sécurité nationale. Il est vrai que les communications présentées par des universitaires invités à ces rencontres traitaient de thèmes qui ne pouvaient déboucher que sur ce genre de cacophonie. «L'éducation et la défense nationale» de M.Mustapha Chérif, ancien ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, «Communication et défense nationale: enjeux et défis», de Mme Maya Sahli, chargée de cours à l'ENA, ou encore «La femme et la défense» de Mlle Louisa Aït Hamadouche, universitaire et journaliste, ont suscité beaucoup de brouhaha dans la salle durant les débats qui s'ensuivirent et induit toute une série d'interventions et de mises au point de la part de personnalités importantes sur la scène nationale. L'une des plus remarquées et des plus suivies fut justement celle du général-major, Mohamed Touati, le conseiller à la défense auprès du président de la République. Après avoir entendu les redondances et les rhétoriques de certains intervenants dans les débats qui louaient souvent sans conviction les hauts faits de la glorieuse ALN dans le passé et de l'ANP aujourd'hui, le général Touati est monté à la tribune pour apporter quelques clarifications nécessaires et utiles à ses yeux. D'abord, selon le général Touati, l'Armée nationale populaire, même si elle les apprécie, n'a pas besoin de «louanges gratuites» pour la simple raison que c'est «une institution nationale» comme ses semblables de l'édifice institutionnel du pays, et qu'à ce titre «elle peut faire l'objet de critiques objectives aussi bien dans son organisation et dans son activité, que dans le comportement de ses cadres». Dans une allusion directe à la crise entre les pouvoirs publics et les médias, le général a dit qu'on pouvait «oublier certains abus de la presse, en les mettant sur le dos de l'apprentissage et qu'il espérait que cette dernière s'en tiendra à son rôle». Ensuite, d'après le conseiller à la défense auprès de la présidence, «l'ère nouvelle exige des débats et des critiques», précisant au passage que «notre défense ne peut être qu'une défense de toute la nation dans sa dimension populaire». Dans une réplique indirecte à une intervention dans les débats de M.Abderrahmane Belayat, vice-président du Conseil de la nation, qui avait fait des rappels historiques sur quelques étapes de la guerre de libération nationale et notamment la notion de bien et de son corollaire, le poids du facteur religieux à travers la notion sacrée du djihad, le général Touati a considéré que «si l'Islam ne pouvait pas être dissocié de la libération, le but en lui-même n'était pas un but purement religieux mais un but de souveraineté nationale». Il a par conséquent martelé qu'il ne voulait pas revoir revenir dans( le pays ) «des imams ou des hurluberlus qui viennent appeler à travers les mosquées au djihad parce que nous avons connu cela à une époque récente» avec les dérives que tout le monde connaît. Enfin, revenant à ce que pourrait être l'âme, sinon l'essence de toute défense nationale, autant dans son organisation que dans ses moyens, il a estimé que c'est avant tout «un sentiment national» suivant l'adage ou la formule qu' «on ne défend que ce qu'on aime», citant au passage le cas de l'armée irakienne qui s'est écroulée sans combattre devant l'adversaire. Toutefois, il s'est dit «réconforté» de voir autant la société politique que la société civile s'intéresser aux questions et aux problèmes de défense et de sécurité du pays. Autrement dit, ces deuxièmes journées parlementaires sur la défense nationale ont été bénéfiques pour tous les acteurs et les observateurs du domaine militaire national.