La petite ville balnéaire qui vit principalement de la pêche, réapprend à vivre avec les tentes, la poussière, la précarité et...la menace terroriste... L'un des paradoxes du tremblement de terre est de laisser trop d'interrogations en suspens. Celui qui a frappé de plein fouet la ville de Zemmouri, le 21 mai dernier ne déroge pas à la règle. A moins de 2 kilomètres de Zemmouri-ville, sinistrée à 100%, Zemmouri El-Bahri panse ses blessures en se dressant fièrement face à la mer. Très peu touchée par le séisme (moins de dix habitations effondrées), malgré la proximité de l'épicentre, Zemmouri El Bahri vit en dépit d'une saison estivale plate. Près du port, l'allée piétonnière offre toujours ses repas avec vue sur mer. Les trois ou quatre petits «restos» font une spécialité de la sardine grillée sur braise. Le grand restaurant l'Hippocampe est encore ouvert. Vaste, propre et intact malgré le séisme, il vous mijote toutes sortes de mets et de spécialités locales à prix réduits. Les odeurs d'espadon et de thon grillé, de rouget farci ou de raie à la sauce emplissent les alentours. Des odeurs appétissantes et alléchantes qui «caressent voluptueusement les narines des passants», mais qui ne sont pas accessibles à une tranche de la population avoisinante, vouée, à l'intérieur des tentes à «gober les repas chauds servis par les organismes humanitaires». Ce petit coin tranquille tranche carrément avec la ville de Zemmouri qui a subi, de plein fouet, le déchaînement de la nature. C'est là que les citoyens du centre-ville viennent décrisper leur mine défaite et le poids écrasant des pertes subies. Depuis l'inoubliable journée du 21 mai, la ville de Zemmouri tente vainement de «fignoler son image». Les répliques quotidiennes durement ressenties renvoient sa population à la dramatique journée de mai pour se souvenir de la psychose qui a régné. Devenues aujourd'hui plus sévères, les répliques provoquent des réactions psychologiques, des mouvements de population et un regain de religiosité. Une certaine crispation idéologique s'est manifestée lors de débats sur le programme du gouvernement. En termes clairs, ces répliques exacerbent les tensions au sein de la population «condamnée à subir, à l'intérieur des tentes usées, un hiver qui s'annonce rigoureux». Les promesses de les reloger non tenues par les autorités, ont généré des émeutes violemment réprimées par les mêmes autorités. Le double langage entretenu alimente des foyers de tension qui, aujourd'hui menacent la stabilité de la localité. Il est de même dans les communes avoisinantes où des incidents similaires se sont déroulés et où la machine judiciaire, mise en branle, «a dangereusement sévi». Devant la menace de revendications sociales, les forces de sécurité «s'ingénient à maîtriser la colère qui gronde». Certains dérapages qu'on oserait qualifier de «bavures» enregistrés ça et là attisent le sentiment d'insécurité au sein de la population. L'incident de Ain Z'mam qui a coûté la vie à un camionneur en est l'exemple éloquent qui, au demeurant «légalise la colère». En bref, les protestations populaires qui souvent conduisent à des émeutes, les grèves des enseignants et le phénomène récurrent du terrorisme qui menace dangereusement la région sont autant d'indices révélateurs «d'une mobilisation des forces de sécurité». Ce sont là autant d'ingrédients qui nous poussent à dire que «les services de sécurité auront du pain sur la planche»