La grève des greffiers qui a pris, hier, une tournure certes pas si attendue, mais crainte car le pouvoir est passé à la vitesse supérieure avec la menace de révocation de tous les grévistes, priés par ailleurs de prendre le large au-delà du périmètre des juridictions où tout rassemblement est désormais interdit. Et les propos balancés par un président du tribunal situé dans la cour d'Alger sont clairs: «Ou ces messieurs-dames reprennent ce lundi ou c'est le conseil de discipline et les tuiles au-dessus des têtes!» s'exclame le juge plutôt serein, alors que le procureur en titre, lui, grille une sèche dans une nervosité qui ne dit pas son nom. A neuf heures pile, Abderrahim Regad, le procureur descend les douze marches du Palais de justice de Bir Mourad Raïs et se dirige vers les grévistes groupés sur le flanc Est de la pharmacie «Bouazziz». Flanqué d'un commissaire et d'un officier de police, le parquetier avertit les grévistes: «Il est intolérable que vous occupiez cette partie de la juridiction en plein parking: de deux choses l'une, ou vous revenez dans vos quartiers à l'intérieur du tribunal ou vous rentrez chez vous en prenant le risque de passer en conseil de discipline» menace, sans paniquer, Regad que tiennent à l'oeil depuis le portail, Zouhir Talbi et Djamel Gasmi. «Non, monsieur. Nous maintenons nos exigences!» répond une greffière. Nous quittons Bir Mourad Raïs pour Boumerdès où les responsables sont aussi muets que des carpes», comme aurait dit Chouaïb Oultache au président de la chambre d'Alger. Et Boumerdès, vers les onze heures, tous les greffiers étaient assis à près de cinquante mètres de la cour où se tenaient deux audiences: une criminelle et une correctionnelle. Evidemment, deux greffiers «non grévistes» assurent les audiences. Sur la dalle de sol de la salle des «pas perdus» Maître Ahmed Benantar de Rouiba est dans tous ses états. L'appel n'a pas été réalisé. Heureusement le mal n'est pas entier. Maître Benantar détient sur lui une prise d'acte du greffier en chef que l'appel n'a pas été interjeté à temps à cause des grévistes. Vers les treize heures quarante, à El Harrach, seuls une demi-douzaine de greffiers assurent la marche du tribunal (le pénal). En tout état de cause, le bras de fer continue. Une petite marche sur Sidi M'hamed a eu lieu vers midi et ce matin, une grande marche des greffiers se prépare pour le «Mouradia» où espèrent les nombreux grévistes qu'une oreille attentive les entende et bien qu'ils ne le souhaitent. Affaire à suivre donc.