Une «condamnation de principe» est exprimée par rapport aux agressions à coups de barres de fer et de dobermans subies par la direction légitime du FLN. Dans le journal français Le Monde daté de dimanche-lundi, Aït-Ahmed, président du FFS, a dressé un tableau sombre sur ce qui se passe actuellement en Algérie. Le choix de la date de cette sortie est loin d'être fortuit. Aït-Ahmed, qui est le dernier historique en vie, avec Ben Bella, a opté pour la date-symbole du premier Novembre pour rompre le silence. «La crise qui secoue le sommet du pouvoir, écrit-il, et, partant le FLN, a au moins un mérite : montrer combien en Algérie suffrage universel et élection à la magistrature suprême n'ont rien à voir.» Le président du FFS explique plus loin cette vision des choses. Pour lui, les élections ont «toujours relevé des hauts dignitaires militaires». Mais, les choses semblent nettement différentes à quelques mois à peine de la présidentielle de 2004. «Jamais sans doute, l'étalage de ces primaires à l'algérienne, commencées un an avant l'échéance de 2004, n'aura été aussi flagrant, voire obscène. La difficulté des clans militaro-policiers à s'entendre sur le candidat le plus à même de garantir la pérennité de leur pouvoir et de leurs intérêts est à l'origine d'une crise si grave qu'elle a débordé du huis clos traditionnel». C'est cette différence, en somme, qui fait que la situation est aussi trouble et les enjeux loin d'être clairs à quelques mois à peine du jour J. Aït-Ahmed, qui n'a jamais eu à aborder la question des attaques menées contre le FLN, y revient enfin avec le franc-parler qui a toujours été le sien: «Que dire de cette affaire, hormis exprimer une condamnation de principe des agressions à coups de barres de fer et de chiens dobermans qui ont visé la direction officielle d'un FLN remis au goût des luttes internes de la nomenklatura?». Pour cet historique, qui connaît bien le système pour l'avoir subi maintes fois, de pareils faits condamnables ne sont que la préparation d'un «nouveau coup de force» visant à «confisquer le droit des Algériens à l'autodétermination, qui fût pourtant la raison d'être de la Guerre de Libération». Affirmant que «trop d'injustice, d'arrogance, de prédation ont rendu inéluctable le divorce entre la société et l'ensemble du système», le chef du FFS, qui vit en exil en Suisse depuis des années, réclame une «refonte» de l'Etat et de la nation. Même si aucune allusion n'est faite par rapport au chef de l'Etat, il ne fait aucun doute que des termes aussi durs sur l'échec du régime et sa rupture avec la société ne peuvent être justifiés que par les nombreux scandales éclatés récemment à propos de la gestion «bouteflikienne» des affaires de la cité. La refonte dont parle le président du FFS passe, selon son concepteur, par «l'élection d'une Assemblée constituante qui exige la mise en place d'un gouvernement de transition» ainsi que par «le respect des conventions et pactes internationaux signés par l'Algérie, notamment en matière de droits de l'homme et de protection des populations». A la lumière de cette sortie, il semble ne faire aucun doute, aux yeux des observateurs, que le FFS ne prendra pas part à la prochaine présidentielle puisqu'il exige un changement radical du système, et non plus quelques changements dans la continuation, pour reprendre une expression devenue célèbre dans le jargon politique national. Cette lecture peut, toutefois, être démentie par les faits et la fièvre électoraliste qui a gagné toute la classe politique en ce mois de Ramadan et de conciliabules. Aït-Ahmed peut avoir utilisé cette date et cette sortie, en effet, pour annoncer son «come-back» sur le devant de la scène médiatico-politique. «Les Algériens sont en droit d'attendre de la communauté internationale qu'elle cesse, au minimum, de cautionner un régime dont la seule légitimité réside précisément dans la reconnaissance internationale», affirme-t-il, parlant, au passage, de véritable «omerta internationale». C'est «la seule manière d'éviter que l'Algérie sombre dans le chaos et que notre société continue à se disloquer. Une situation qui interdit toute unification du Maghreb, condition sine qua non d'un développement durable de cette région et de l'instauration d'un pôle de stabilité en Méditerranée», écrit encore le leader du FFS. Selon lui, après une courte et intéressante ouverture démocratique, le pays est vite retombé dans une sorte de «gangstérisme politique». Les observateurs, toutefois, se demandent pourquoi ce grand militant de la cause nationale a choisi un journal français pour sa première sortie médiatique forte depuis de nombreux mois, et en une date aussi significative.