Mis au pied du mur par la guérilla, les Américains réfléchissent à infléchir leur programme en Irak. Face aux coups portés aux forces de la coalition américano-britannique par la guérilla irakienne, l'Administration Bush semble admettre, indirectement en fait, la nécessité d'un certain infléchissement de son programme pour l'Irak, en cherchant notamment à «brusquer» la transition et le transfert de plus de pouvoirs aux Irakiens. Il fallut toutefois que coule beaucoup de sang, notamment américain, pour que les stratèges de la Maison-Blanche, du Pentagone et du Département d'Etat conviennent que les choses n'évoluent pas de la manière qu'ils avaient prévue et espérée d'autant plus qu'avec les attaques répétées qui ciblent les forces d'occupation, singulièrement américaines, d'aucuns estimaient que les Etats-Unis prenaient le chemin de l'enlisement rééditant le bourbier vietnamien. Cette donne, il ne fait pas de doute, a amené le président américain, George W.Bush, à juger qu'il était «temps de donner plus de pouvoir aux Irakiens dans l'administration de leur pays». Ce que la communauté internationale et les Irakiens réclamaient en fait depuis la chute du régime de Saddam Hussein et l'occupation du pays par les forces de la coalition américano-britannique. Donc, si aujourd'hui les Etats-Unis assouplissent leurs positions, -quand bien même le président Bush a affirmé, dans un entretien au Financial Time et au Daily Télégraph de Londres, à la veille de sa visite en Grande-Bretagne, que «Nous ne nous retirerons pas (d'Irak et d'Afghanistan) tant que le boulot ne sera pas fait, Point final» cela est dû essentiellement à la détérioration de la situation sécuritaire en Irak. Le sanglant attentat contre le contingent italien à Nassiriyah a même eu pour effet de dissuader certains pays à envoyer dans l'immédiat des troupes en Irak. C'est notamment le cas du Japon qui a décidé de surseoir à l'envoi de soldats nippons, envoi qui était prévu pour le mois prochain. En revanche, l'Italie quoique endeuillée par la mort de 18 soldats dans l'attentat de mercredi, a décidé de maintenir sa présence militaire et d'envoyer 75 nouveaux carabiniers en renfort au contingent stationné à Nassiriyah. Le secrétaire à la Défense américain, Donald Rumsfeld, a entrepris depuis hier une tournée chez les alliés asiatiques des Etats-Unis quelque peu refroidis par l'évolution de la situation en Irak et de plus en plus divisés sur l'envoi de troupes. M.Rumsfeld qui était hier au Japon, avant d'atterrir en Corée du Sud, va s'atteler à rassurer les partenaires asiatiques de Washington. Ainsi, hier à Tokyo, le ministre américain a déclaré «Nous avons le sentiment que nous progressons. Mais nous reconnaissons que c'est (l'Irak) un endroit dangereux, et que l'incidence de techniques de conflit de faible intensité crée un effet de danger», faisant allusion à la résistance irakienne. Le secrétaire d'Etat américain confirme qu'il n'y a pas de décision de retrait indiquant: «Il n'y a pas de décision de se retirer plus tôt, bien au contraire en fait. Le président (G.W.Bush) a pris l'engagement que nous resterions là-bas aussi longtemps que nécessaire.» Certes, mais le fait même que l'éventualité du retrait des forces américano-britanniques est mise sur le tapis indique a contrario que les Etats-Unis ne sont plus les seuls maîtres du destin de l'Irak.