A Oran, même les hôpitaux n'échappent pas à la violence Si la victime n'est pas admise pour une hospitalisation, se faire suturer le visage et le cou est préconisé sur place par le médecin de permanence. «Quatre personnes ont été victimes d'agressions, toutes exécutées à l'arme blanche et ce, durant les dernières 72 heures», apprend-on auprès des services des urgences médico-chirurgicales du Centre hospitalo-universitaire d'Oran. Le premier cas a eu lieu dans le célèbre quartier populaire Ibn Sina (ex Victor- Hugo). La victime, qui a été évacuée en urgence vers l'hôpital d'Oran, a reçu plusieurs coups d'une sauvagerie inouïe qui lui ont été assénés au niveau du dos. Cela s'est passé dans la même journée où trois autres cas d'agressions avec une arme contondante ont été enregistrés dans les avenues Choupot, Sedikia et Plateau. Dans ce petit bilan, un seul mobile est à l'origine de ces violences, des altercations verbales qui ont failli se transformer en drames. Oran-ville fait peur étant donné que plusieurs de ces quartiers et cités ne sont pas épargnés par la montée fulgurante de cette nouvelle forme de communication basée essentiellement sur la violence. Les praticiens et infirmiers des services des urgences médico-chirurgicales d'Oran, mobilisés en renfort pendant ce mois de jeûne, ont eu à traiter, du début du mois en cours à ce jour, pas moins de 200 cas de différentes violences. Ces dernières ont toutes été perpétrées à l'arme blanche appelée localement Bouchia, couteau de cuisine qui sert à dépecer la viande animale. Cette arme blanche est facile à dissimuler dans les sous-vêtements mêmes. En effet, à la moindre dispute, cette arme prohibée, fait aussitôt son apparition lors de règlement de comptes entre bandes rivales, appelées dans le jargon local «Naqra». Le mot Naqra désigne les fauteurs de troubles. Malheureusement, la deuxième ville du pays est, au grand dam de ses habitants et de ses visiteurs, devenue cette cité où l'usage de toutes ces armes tranchantes n'est qu'un simple entraînement de routine, particulièrement dans les vols et braquages des passants. Nombreuses sont les cités qui constituent un véritable coupe-gorge pour les passagers, en particulier les étrangers au quartier. La Bastille, connue pour son grand marché populaire, est devenue une citadelle inexpugnable, tout accès à son intérieur est synonyme de hauts risques dont le vol à la tire le jour et à l'interpellation en groupe la nuit. Idem à Saint-Pierre et Cavaignac, deux autres quartiers populaires, en décomposition avancée, situés à quelques encablures de la rue Larbi-Ben Mhidi. Cette rue n'est pas en reste puisque plusieurs bandes l'ont élue comme lieu de prédilection pour soulager les passants de portables, bijoux, et argent avant de se replier dans une course incroyable, vers les entrailles des quartiers limitrophes. Les habitants du vieux Derb, quartier situé à quelques pas de la célèbre place du 1er Novembre, ex-place d'Armes, vivent, eux aussi, au rythme d'une violence inouïe alors que les rues et ruelles obscures de Sidi El Houari sont difficilement accessibles aux moins audacieux. «Tant pis pour les aventuriers qui ont bravé les samouraïs des quartiers populaires, ils ont voulu», disent souvent les poltrons. Pendant que le malfrat achève l'exécution de son plan, ce dernier ne trouve rien de mieux à faire pour se frayer un chemin dans la foule que d'exhiber son couteau, question d'effrayer le peu d'audacieux qui osent réagir dans le but de le stopper. En tout cas, déambuler la nuit dans les rues dangereuses de ces quartiers est synonyme d'un inévitable braquage à l'arme prohibée, pointée aussi bien dans les reins que dans le cou. Résister à l'«injonction» opérée par les malfrats, en guet-apens permanent, est significatif d'une évacuation, aussitôt le coup achevé, de la victime vers les services des urgences médico-chirurgicales. Quand ce n'est pas une hospitalisation, se faire suturer la tête, le visage, le cou, le dos, les cuisses et même le ventre et la cage thoracique est vivement recommandé par le médecin de permanence. La violence continue à se manifester, notamment dans les quartiers populaires et ce, en dépit de la mobilisation de l'impressionnant dispositif de sécurité, un peu partout dans les coins de la ville, plusieurs jours avant l'entrée en vigueur du mois sacré de Ramadhan.