Alors que les prix augmentent sur le marché international, l'Algérie reste un gros importateur de céréales. L'Algérie a importé pour un milliard de dollars de céréales en neuf mois. Elle est classée parmi les plus gros importateurs de par le monde. Quelles sont les raisons qui expliquent une facture aussi élevée? L'Algérien est un gros mangeur de pain, c'est connu, toutes variétés confondues! Pain de boulanger, galette maison et tout ce qui y ressemble: pizza, m'hadjeb, gâteaux sucrés et salés. Et parallèlement, il y a le couscous sous toutes ses formes, le berkoukès, la trida et la chekhchoukha de Biskra largement répandue à l'est du pays. Sans oublier les spaghettis et autres macaronis, avec les cheveux d'ange ou la h'rira pour une bonne chorba, surtout pendant le Ramadan, mais pas seulement. Les pâtes sont tous les jours au menu. Ce modèle alimentaire conditionne nos factures à l'importation, le sol algérien étant incapable de subvenir aux besoins de la population en blés dur ou tendre, en orge, en soja ou en maïs. Malgré une récolte évaluée à 42,6 millions de tonnes pour la saison passée, ce qui est une bonne performance, la demande est loin d'être satisfaite. Et pourtant, des mesures d'encouragement avaient été initiées par le gouvernement à l'effet d'augmenter la production nationale en céréales, mesures malheureusement dévoyées par certains agriculteurs peu scrupuleux, qui ont cultivé des céréales sur des terres qui ne conviennent pas du tout à ce genre de culture, notamment dans les régions semi-arides. La seule chose qui les intéressait étant d'empocher les fameuses subventions, sans tenir compte de la nature du sol, et pour des rendements à l'hectare qui sont insignifiants. Ces calculs ont amené les pouvoirs publics à lier ces aides à un zoning mieux étudié pour plus d'efficacité. Depuis quelques années en effet, les rendements à l'hectare sont en augmentation constante, mais la poussée démographique et les habitudes de consommation orientées vers les pâtes font que les besoins en céréales sont de plus en plus importants, pour des factures à l'importation toujours plus lourdes, surtout si l'on y ajoute, bon an mal an, une enveloppe de 255 millions de dollars en importation de sucre. Un opérateur privé algérien avait promis de se lancer dans la production de sucre en inondant le marché algérien, voire d'exporter du sucre, mais pour l'instant, ces promesses restent des paroles en l'air et n'engagent que ceux qui les font. Le lobby des importateurs a eu apparemment le dessus sur celui des producteurs, mal organisés et surtout moins puissants. Le Canada arrive en tête des pays fournisseurs de blé dur et tendre, avec près de 231 millions de dollars pour la période précitée, suivi par l'Allemagne et la France. Mais l'Algérie se fournit presque sur tous les marchés du monde, surtout que depuis quelques années des importateurs privés se sont mis de la partie, à côté des organismes publics qui sont anciens dans le créneau. A titre de comparaison, on peut citer le cas de l'Arabie Saoudite, qui arrive à s'autosatisfaire en production de céréales, voire à exporter, mais l'Algérie, qui possède les mêmes conditions ou presque au sud du pays, ne peut pas consentir les mêmes investissements, qui s'avèrent trop coûteux, à moins d'ouvrir le créneau à l'investissement privé, qu'il soit algérien ou étranger. On a vu ce qu'il en était de cet investissement privé dans d'autres secteurs, comme celui de la concession des infrastructures (métro, autoroute, ports). L'Algérie reste, qu'on le veuille ou non, un pays qui n'arrive pas à attirer les investissements directs étrangers, sauf dans le secteur des hydrocarbures, sans doute pour des raisons liées à des facteurs sécuritaires ou même d'adaptation de la législation, alors que nous continuons à avoir l'une des bureaucraties les plus paralysantes du monde. Par ailleurs, il y a une chose qu'il faut se dire: c'est que si le prix du baril augmente, celui du quintal de blé aussi a augmenté dans une proportion de 40 % sur le marché mondial. En d'autres termes, ce que l'Algérie gagne d'un côté, elle le perd de l'autre.