La Somalie devait avoir hier un nouveau président, à l'issue d'un vote de son Parlement et d'un processus que certains, Nations unies en tête, qualifient «d'historique» pour sortir le pays de deux décennies de guerre civile et de chaos politique. L'élection, à laquelle 25 personnes, dont le président sortant Sharif Cheikh Ahmed, sont candidates, doit parachever une transition parrainée par l'ONU et destinée à doter d'institutions stables un pays privé de réel gouvernement central depuis la chute du président Siad Barre en 1991. Depuis cette date, la Somalie est livrée aux chefs de clans, seigneurs de guerres, groupes islamistes et gangs criminels. Le Parlement récemment désigné a commencé à voter hier à Mogadiscio pour élire un président de la Somalie, dans le but de rétablir une autorité centrale dans un pays en guerre civile qui en est dépourvu depuis 21 ans. Le nouveau président du Parlement, Mohamed Osman Jawari, élu pour sa part par ses pairs le mois dernier, a été le premier à déposer son bulletin dans l'urne, pour ce scrutin où 25 candidats sont en lice dont le chef d'Etat sortant à titre transitoire, Sharif Cheikh Ahmed, candidat à sa réélection. Les parlementaires se succédaient pour voter, dans une chaleur étouffante dans la salle bondée de l'Ecole nationale de police, transformée pour l'occasion en Parlement. 229 députés sont présents - sur un total de 275 qui doivent siéger à terme - pour départager les candidats, parmi lesquels figure également le Premier ministre sortant, Abdiweli Mohamed Ali. Une victoire au premier tour nécessitera au moins deux tiers des votes, un cas de figure improbable selon les analystes, ce qui devrait nécessiter l'organisation d'au moins un autre tour de scrutin après désistement des candidats les moins bien placés. Cette élection attendue après plusieurs reports - aurait dû avoir lieu le 20 août au plus tard - représente «une des dates les plus importantes de l'histoire politique de la Somalie», a affirmé hier l'envoyé spécial des Nations Unies pour ce pays, Augustine Mahiga. L'ONU espère que la mise en place d'autorités centrales élues à titre définitif - par opposition aux autorités temporaires qui se succèdent depuis 2000 - permettra de restaurer un Etat de droit en Somalie, en profitant des échecs militaires essuyés ces derniers mois par les insurgés islamistes shebab. En effet, jusqu'ici, les tentatives pour restaurer une autorité centrale ont échoué les unes après les autres. Les autorités de transition qui cèdent aujourd'hui la main, mises en place il y a huit ans et soutenues ces dernières années à bout de bras par la communauté internationale, terminent leur mandat sur un même échec. Pour l'ONU, le vote d'hier est la meilleure chance pour la paix en plus de 20 ans. Des analystes craignent cependant que les mêmes figures et le même système pourtant gangrené par la corruption restent au pouvoir. Les députés choisiront le président dans un scrutin à bulletin secret. Intervenant ce week-end devant eux, comme une dizaine d'autres candidats, Sharif Cheikh Ahmed, élu en 2009 après avoir rallié les institutions de transition qu'il combattait auparavant à la tête d'une rébellion islamique, a défendu les progrès faits en matières économique et sécuritaire sous son mandat. Le personnage est cependant controversé: en juillet, un rapport de l'ONU estimait que sous son autorité, «détournements de fonds systématiques, accaparement pur et simple de fonds et vols d'argent public sont devenus des systèmes de gouvernement». Parmi ses principaux adversaires hier figure l'actuel Premier ministre Abdiweli Mohamed Ali, formé aux Etats-Unis et qui a lui-aussi défendu les avancées en matière de «construction de la paix» et de «bonne gouvernance» ces derniers mois en Somalie. L'élection du président se déroule alors que la force de l'Union africaine dans le pays (Amisom), qui intervient en soutien des forces gouvernementales, a infligé une série de revers militaires à la principale rébellion du pays, les islamistes shebab.