«Le pouvoir doit s'attendre à une opposition farouche» Dans cet entretien qu'il nous a accordé au siège de son parti à Alger, Hamlaoui Akkouchi, SG d'El Islah revient sur le plan d'action du gouvernement adopté dernièrement par l'APN et promet une opposition islamiste farouche au sein du Parlement durant tout ce mandat. Il parle des alliances que l'AAV se dit disponible à contracter, y compris avec les partis de la mouvance démocratique. L'Expression : Le plan d'action du gouvernement vient d'être adopté à l'APN par la majorité issue du FLN et du RND. Quel regard portez-vous sur ce plan ? Hamlaoui Akkouchi : Les députés de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV) ont voté contre ce plan d'action qui est une partie du programme du chef de l'Etat. Le plan global de ce dernier a échoué de l'aveu de Bouteflika lui-même lorsqu'il a affirmé que les élus ont avorté son programme et de l'ex-Premier ministre Ahmed Ouyahia lorsqu'il a déclaré que la maffia gère l'économie nationale. Et ce n'est pas le nouveau Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui viendra prétendre, sans fixer d'agenda, qu'il a la « baguette magique » pour poursuivre le programme de Bouteflika alors que seulement la moitié de ce programme a été réalisée et qu'il ne reste que moins de 2 ans pour faire le reste. Sellal dit aussi des choses illogiques comme celle relative à la création de trois millions de postes d'emploi à l'horizon 2014. C'est une tentative de vendre le projet de son gouvernement et de satisfaire le peuple. Ce plan d'action, non doté de mécanismes pour son application, ne nous convainc pas et c'est pourquoi on a voté contre. Comment Sellal peut-il désamorcer les mines sur lesquelles il marche ? Mais soyez sûr, on ne souhaite pas l'échec du Premier ministre mais selon les données dont nous disposons, il est impossible qu'il puisse avancer d'un pas. Lors des débats et de l'adoption de ce plan d'action, on a constaté une véritable opposition des islamistes, s'ajoutant au retrait du MSP de l'Alliance présidentielle puis du gouvernement... Dès nos premières rencontres avec le MSP, on a remarqué que nos frères ont tiré les leçons et ont décidé de rallier l'opposition. On a alors décidé de leur tendre notre main pour consolider et conforter l'opposition islamiste. Malgré toutes les campagnes menées contre lui (le MSP, Ndlr) par le pouvoir et ses partis, et les tentatives de le vider de sa substance en renforçant le rôle de Ghoul, il est resté debout avec ses deux frères, El Islah et Ennahda et actuellement dans le cadre de l'Alliance de l'Algérie verte. Il y a donc une véritable opposition sage et visionnaire, loin de tous les calculs aux conséquences désastreuses. C'est pourquoi, les députés de l'AAV, soutenus par les dirigeants de l'Alliance, ont voté, comme un seul homme, contre le projet du gouvernement. La législature s'annonce-t-elle chaude entre les islamistes et le FLN et pénible pour le pouvoir ? L'AAV n'a participé ni au gouvernement ni aux instances de l'APN dans l'objectif de constituer une véritable opposition au sein du Parlement. Le gouvernement doit compter avec une AAV qui lui mènera la vie dure. Et si l'Alliance a décidé de prendre part aux élections locales du 29 novembre prochain, ce n'est pas pour le changement car, il n'est pas possible en Algérie d'opérer le changement par le biais des élections. C'est le peuple qui l'imposera s'il le veut. On y participe pour être l'oeil du peuple, pour contrôler l'argent public et contribuer à atténuer les peines des Algériens même si l'on sera encerclés par des partis beni oui oui et autres partis de soutien qui ont inondé la scène politique. Pour mener la vie dure au pouvoir, êtes-vous prêts à contracter des alliances avec les autres partis de l'opposition qu'ils soient de la mouvance islamiste ou autre ? Depuis la création de l'Alliance verte, nous cherchons l'union avec les plus proches de nous en matière de vision et d'appartenance. On continuera à le faire car le mode de l'entente est ancré en nous. L'Algérie a été libérée par tous et sera construite par tout le monde, elle n'appartient pas exclusivement aux islamistes, ou laïques ou aux nationalistes. Notre main est donc tendue pour ces alliances. Y compris avec le RCD et le FFS ? Pour construire l'Algérie, la démocratie, les libertés publiques et l'unité nationale, on se rencontre avec tous les partis. J'ai l'espoir que l'opposition qui va venir sera forte. Il y a plusieurs paramètres que je prends en considérations pour l'affirmer. En plus de l'AAV, il y a un parti qui sera conduit par Karim Tabbou qui peut être un véritable parti d'opposition, étant donné la constance des positions de Tabbou. Idem pour le RCD qui est entrain de rajeunir ses dirigeants et dont le nouveau président, Mohcine Belabbas développe un discours très respectable. Le temps de l'intégrisme sous toutes ses formes et des discours rétrogrades est révolu. Les observateurs affirment que le TAJ (Tadjamouâ Amel El Djazaïr) videra les partis islamistes de leur substance. N'avez-vous pas des craintes à ce propos ? Ghoul avait soif de rester dans son poste au gouvernement et, constatant que le pouvoir avait l'intention de vider les partis islamistes de leur substance, il a investi la scène pour être un RND bis sans prendre en compte que les choses ont changé et la conjoncture du printemps arabe ne permet pas ça. Les gens attendent la mort de ce parti dont 90% de la composante est opportuniste dans les années à venir. Des conflits internes vont apparaître et vont l'achever. Moins de deux mois nous séparent des élections locales. Comment allez-vous les aborder ? On va y participer avec la crainte que le scénario du 10 mai dernier se reproduise. Le pouvoir qui ne croit pas que le changement viendra des urnes mettra les Assemblées populaires communales et de wilaya entre des mains sûres qui lui sont acquises pour poursuivre son plan selon sa volonté, comme c'est le cas au Parlement. Et le pouvoir ne compte pas uniquement sur la fraude. Il y a d'abord ce taux éliminatoire de 7% exigé des partis participants pour siéger dans ces assemblées. Ce taux sert les desseins et les positions du pouvoir et le FLN, qui n'a pas une élite respectable et qui est utilisé comme un moyen pour s'enrichir et s'accaparer l'argent public, en est le grand bénéficiaire. Le cas ne diffère pas trop pour ce qui concerne le RND. Il y a ensuite l'abstention des électeurs dont les conditions sont créées par le pouvoir. Ce dernier travaille et fait l'impossible pour que le taux de participation réel ne dépasse pas les 20%.