L'économie algérienne et la stabilité politique dans la région sont sérieusement menacées par ce fléau, corollaire du crime par excellence. La production de cannabis au Maroc atteint 47.000 tonnes par an, selon un rapport de l'ONU qui confirme que le Maroc est une plaque tournante du trafic de drogue en Afrique voire dans le monde et dont l'Algérie constitue un pays de transit. Il va sans dire que ce phénomène est le dénominateur commun de toutes les formes de crime. La production annuelle au Maroc, représente un chiffre d'affaires estimé à 12 milliards de dollars sur le marché mondial, révèle le même rapport des Nations-unies. La culture illicite qui couvre 134.000 hectares du rif, au Nord du royaume, ne rapporte que 214 millions de dollars aux agriculteurs marocains concernés, précise l'étude menée conjointement par l'Office des nations unies contre la drogue et le crime (Onudc) et les services officiels du Maroc et publiée lundi à Rabat. Le rapport, premier du genre concernant le cannabis, a été présenté à Rabat, au cours d'une conférence de presse, par les responsables de l'Onudc et de plusieurs ministères marocains concernés par la lutte contre la drogue. Dans le contexte de lutte internationale contre ce fléau, les observateurs se taraudent l'esprit sur les raisons de cette manifestation onusienne alors que le Maroc était qualifié de «plaque tournante du trafic mondial de drogue par certains services de sécurité». «Pourquoi les institutions internationales se prononcent aujourd'hui alors que le Maroc était, depuis toujours, le principal pour de drogue, donc du crime et que ce phénomène est un facteur de ralentissement de l'union du Maghreb voire de l'Afrique» s'interrogent les mêmes observateurs. Pourquoi les officiels marocains tiennent-ils un double langage lors d'émissions thématiques télévisées sur des chaînes très connues affirmant, d'un côté «l'impuissance du régime chérifien à combattre le phénomène arguant la pauvreté qui pousse les agriculteurs à se livrer à la culture et la vente du cannabis» et affichant d'un autre côté «leur volonté de s'inscrire dans la stratégie de lutte internationale». Dans ce contexte il est utile de signaler que la communauté internationale a été invitée, dans un communiqué de juin 2003 du conseil de sécurité, à renforcer la coopération pour lutter contre la production et le trafic de drogue en Afghanistan. Une résolution similaire destinée au Maroc serait souhaitable tant l'existence de ce fléau menace la sécurité, donc par voie de conséquence, la stabilité politique dans la région. M.Lakhdar Brahimi, représentant spécial du secrétariat général pour l'Afghanistan avait insisté «sur les risques que représente l'insécurité et les activités liées à la drogue sur le processus de paix et de reconstruction». Conscient des liens qui existent entre le trafic de drogues illicites et le terrorisme, ainsi que d'autres formes de criminalité qui menacent la stabilité de l'Afghanistan, la paix et la sécurité dans la région ; cette déclaration souligne également la nécessité de mettre en place un programme d'action complet dans la région ainsi que les Etats de transit et de destination de la drogue. Une stratégie similaire serait-elle concoctée à l'endroit du Maroc qui, rappelons-le, constituait, «une excellente zone de repli pour les groupes terroristes en Algérie?». Si de leur côté, le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont décidé d'allouer respectivement 140 et 170 millions de dollars à la lutte contre ce fléau en Afghanistan au cours des prochaines années, «la communauté internationale sera-t-elle en mesure d'injecter des sommes aussi importantes pour endiguer le fléau qui génère un malaise économique en Afrique?» Le Royaume du Maroc sera-t-il disposé à coopérer et permettre le remplacement des milliers d'hectares de pavot de Ketama par d'autres cultures? Si la collaboration de la communauté internationale est indispensable pour mettre un terme à ce fléau, il est certain qu'aucun objectif ne sera atteint sans une réelle volonté politique du gouvernement marocain. Une volonté qui, toutefois, lèvera tout obstacle à la reconstruction du Maghreb et de l'Afrique.