«Les responsables éditoriaux, qui s'occupaient avant des idées et du contenu des émissions passent désormais leur temps sur les contrats, les rotations des employés et les budgets. Les producteurs, autrefois fiers de récupérer des informations auprès de leurs sources et de leurs contributeurs, doivent dédier autant de temps à réserver des taxis et des studios d'enregistrement.» Journaliste de la BBC Claire Bolderson Les Anglais font parfois beaucoup et parfois moins. En diffusant sur l'émission «Newsnight», un reportage d'investigation sur une enquête incriminant l'ex-animateur vedette, Jimmy Saville, pour faits de pédophilie, puis une dénonciation calomnieuse pour pédophilie d'un ancien haut responsable du parti conservateur... La BBC (British Broadcasting Corporation), organe de production et de diffusion de programmes de radio-télévision britannique, qui vient de fêter ses 90 ans, a vu le week-end dernier son directeur général et son rédacteur en chef, George Entwistle, démissionner. Pour une bourde de ce genre, on est capable de sacrifier son boss pour sauver le bateau. En Afrique, dans le Monde arabe et même en France, un P-DG de chaîne de télévision n'est pas un débarqué pour autant. Il est dur d'être responsable de la BBC. Vous êtes souvent victime de sa réputation. La BBC reste la référence avec Radio Canada, en matière de transparence et de déontologie. La mentalité anglo-saxonne y est pour beaucoup. Mais depuis que la crise financière est passée par là, la télévision britannique n'est plus ce qu'elle était. Et même si les moyens d'investigation sont réduits, Jeremy Paxman, présentateur vedette de «Newsnight», affirme que le budget de son émission, qui était de 12,6 millions d'euros au milieu des années 2000, a été divisé par deux depuis. En 2007, il déplorait la perte de producteurs, d'enquêteurs et de reporters. Dans les années 1970, une équipe avait six mois pour réaliser une enquête, rappelle encore David Herman. Aujourd'hui, les journalistes se basent plus que jamais sur les informations parues dans les journaux et font davantage appel aux techniques de la caméra cachée et de la reconstitution. Les nouvelles technologies ont changé les mentalités des journalistes de la BBC. David Herman les défend et affirme que 99,9% du travail des journalistes est excellent, surtout en radio, et les investissements sur le site Internet d'informations en font l'un des tout meilleurs, si ce n'est le meilleur du monde en langue anglaise. Dotée de financements publics, la British Broadcasting Corporation compte 23.000 salariés travaillant pour sa soixantaine de chaînes radio et télévisées, pour une audience cumulée d'environ 239 millions de personnes. Aux termes d'un accord avec le gouvernement, la BBC s'est engagée à réduire de 20% son budget global d'ici à 2017. Le gouvernement lui a imposé le gel pour les six ans à venir de la redevance télévisuelle (174 euros), qui représente une manne annuelle de 3,7 milliards d'euros. [email protected]