Plusieurs candidats, en concertation, comptent présenter une plate-forme pour garantir un minimum de régularité lors du prochain scrutin. L'homme, qui jouit d'un prestigieux parcours, accorde deux objectifs à cette démarche, «empêcher Bouteflika de décrocher un second mandat», et «mettre en application (son propre) programme» dans le cas où il serait élu au sommet de l'Etat. Dans sa déclaration préliminaire, lors d'une conférence de presse animée hier à la Maison de la Presse, Rachid Benyellès, n'a guère été tendre en direction du bilan présidentiel, même si, chemin faisant, il admet que la déliquescence avait commencé depuis les événements de 88. C'est à cette date, du reste, que Benyellès s'était retiré de toute vie active, se contentant de faire de brèves mais percutantes incursions dans la presse. «Ce confort, explique-t-il, sied mal à la gravité de la situation.» Ce qui justifie cette candidature, à l'issue de laquelle le candidat promet de «faire absolument l'inverse de tout ce qu'a fait Bouteflika». Sur le plan des garanties et des risques de ne faire que de la figuration au regard de la crédibilité dont jouit cet homme, Benyellès se montre catégorique: «Je n'ai jamais rompu mes contacts avec l'institution militaire. J'ai la ferme certitude que l'état-major sera d'une neutralité absolue lors de la future présidentielle.» Une «neutralité», au reste, qualifiée de «mauvais augure» partant du constat que les prémisses d'une fraude massive ne cessent de se préciser. Mais compte tenu de la manière avec laquelle le gouvernement ne cache plus son penchant en faveur de ce que les observateurs qualifient désormais de «candidat-président», Benyellès précise que des contacts existent avec des candidats dans le but de présenter une plate-forme de revendications visant à garantir un minimum de crédibilité et de transparence au prochain scrutin. Sans doute sera-t-il question de l'absolue nécessité du départ d'Ouyahia et de Zerhouni. Le soutien apporté par le secrétaire général du RND et néanmoins chef du gouvernement à Bouteflika n'étonne guère le conférencier, loin de mâcher ses mots, il martèle que «Ouyahia passe son temps aux basses manoeuvres. Il a trouvé en Bouteflika un compère de choix.» Cette sortie, il faut le croire, annonce le début des grandes manoeuvres puisque les déclarations d'intention des autres grosses pointures ne devraient guère tarder à se faire jour depuis la sortie médiatique de Hamrouche, la fin des tournées de Taleb dans l'Algérie profonde en fin de semaine et même de la très prochaine entrée en lice de Bouteflika une fois qu'il aura épuisé son calendrier présidentiel à la suite de l'ouverture de l'année judiciaire et de la tenue du sommet des chefs d'Etat de l'UMA. Benyellès, qui n'hésite pas à aborder tous les sujets, focalise ses interventions autour de la nécessité de «déloger» Bouteflika le plus vite possible, ce qui lui fait dire que «la demande de report des présidentielles formulée par Aït Ahmed ne peut en aucune manière être soutenue» par lui. Dans un tout autre registre, il indique que «Bouteflika s'entendait parfaitement avec l'institution militaire. Mais, depuis quelques temps, des divergences sont apparues entre l'armée et Bouteflika». Le conférencier n'en dit pas plus même si de pareilles révélations en disent déjà assez long. Concernant son programme, tout en insistant sur la nécessité de réduire les voyages et de rester auprès de son peuple, Benyellès se revendique de la famille réconciliatrice, nationaliste mais néanmoins républicaine. Il estime que l'institution militaire, qui a un passé propre, est la garante de la souveraineté et de l'aspect républicain du pays depuis la guerre de Libération. Ce genre de missions doivent être clairement définies une fois pour toutes comme c'est le cas en Turquie et dans d'autres Etats arabes au lieu de continuer à traiter cette question entre deux tendances inconciliables et aussi peu viables l'une que l'autre. De même que le candidat, qui prône la réconciliation, refuse que le FIS soit réhabilité, tout en précisant que la mouvance islamiste est correctement représentée à travers les partis légaux présents. Sur le plan du programme, il prône une politique libérale, basée essentiellement sur les petites et moyennes entreprises, non sans prise en charge conséquente des besoins sociaux pressants des citoyens. La réhabilitation de l'Etat, l'indépendance véritable de la justice et la moralisation de la vie publique sont également des caps nécessaires. Mais la toute première nécessité reste, comme de juste, le retour de la paix civile à travers une lutte acharnée contre le terrorisme aussi bien grâce aux services de sécurité qu'aux citoyens. Benyellès, qui reste candidat à la candidature, affirme oeuvrer à mettre toutes les chances de son côté afin de récolter les 75.000 signatures nécessaires à l'officialisation de sa candidature.