La nuit du réveillon est passée emportant avec elle d'ailleurs, l'an 2012. La fête n'a pas eu lieu ni dans les villages ni même en ville. Cette année, paradoxalement, les pâtissiers s'accordent tous à dire que les commandes pour les bûches de Noël ont remarquablement chuté. L'ambiance n'a pas été au rendez-vous. Fait positif, toutefois, la nuit du réveillon n'a pas été émaillée d'accidents de circulation graves. En effet, la veille, en ville, nous avons essayé de comprendre les raisons de cette baisse de la demande sur les bûches. A la question si les gens n'avaient pas la tête à la fête, les réponses étaient diverses et souvent contradictoires. «Non, je suis très heureux mais je n'ai pas envie de fêter le réveillon. Moi, je préfère Yennayer, le jour de l'an amazigh», affirmait Saïd, enseignant de lycée. Beaucoup de réponses convergeaient en fait vers ce point de vue qui prend de plus en plus de relief. Les citoyens pensent désormais plus à s'affirmer et à affirmer leur propre identité. «Rien au monde ne peut remplacer Yennayer avec le coq fermier et le couscous de grand-mère. Le réveillon, ce n'est pas à nous et c'est cher», ironise Amar lui aussi enseignant de lycée. «Pourquoi ne pas généraliser cette fête authentique que tous les Algériens partagent? Moi, je connais des gens de l'Ouest et de l'Est qui fêtent Yennayer. Si vous voulez savoir, c'est nous, les Kabyles, qui avons abandonné nos traditions amazighes» explique doctement, Moh, assis à une table jouant aux dominos. D'autres par ailleurs, expliquaient la non-célébration de cette fête par leur appartenance religieuse. «Non, je ne le fête pas. Ce n'est pas musulman. En tant que musulmans, nous avons nos fêtes qu'on doit célébrer comme il se doit» affirme, Samir, jeune cafetier à Draa Ben Khedda. En fait, le fait religieux n'est pas très partagé. Bien au contraire, certains jeunes contestent cela par plusieurs arguments. «Moi, je ne suis pas d'accord avec Samir, d'après lui, alors même les fêtes berbères ne sont pas pour les musulmans parce qu'elles ont été fêtées même avant l'Islam», rétorque donc son ami. «La religion n'a jamais interdit aux gens de trouver une raison d'être heureux. Un moment de joie n'a ni nationalité ni religion. Moi, je partage la joie des musulmans, des chrétiens et même des bouddhistes. Quel mal il y a à vouloir être heureux l'espace d'un instant?» affirme un jeune du quartier des bâtiments bleus de la ville de Tizi Ouzou.