L'appel de Hadjar aux sages des deux camps pour une solution concertée en est la parfaite illustration. Même si les préparatifs se poursuivent pour la tenue du congrès des redresseurs, il semble que les animateurs de ce mouvement n'y croient plus beaucoup. C'est, en substance, ce qui ressort de l'entretien express que nous avons eu hier avec le chargé de communication des redresseurs, Abdelkader Hadjar, officiellement rentré à Alger et déchargé de son poste d'ambassadeur d'Algérie en Iran. «Nous ne pouvons rien dire pour le moment à propos du congrès. Nous attendons le prononcé officiel du verdict de la chambre administrative près le tribunal d'Alger.» Explication : «S'il est acquis que les statuts, le règlement intérieur, le bureau politique et le comité central issus du 8e congrès sont désormais illégaux, le parti reste, lui, parfaitement légal. Mais nous avons besoin de lire attentivement les attendus du verdict avant de savoir comment poursuivre notre démarche de redressement du FLN.» Ainsi, Hadjar refuse-t-il de s'étaler sur la course au contrôle des membres du comité central issus du 7e congrès, dont les deux tiers auraient la possibilité de convoquer en toute légalité un autre congrès et prendre ainsi officiellement le contrôle du FLN. «Il est des choses et des démarches que nous nous gardons de révéler à la presse avant leur aboutissement concret sur le terrain», s'est-il contenté de dire. Il n'empêche que Hadjar, qui «récuse le recours à la violence et à l'invective d'où qu'elles viennent, lance un appel solennel aux sages des deux camps pour une concertation constructive afin de sauver le FLN de la cassure qui le menace». Hadjar, en s'exprimant de la sorte, garde donc conscience que si les redresseurs poursuivent leur démarche cavalière à la lumière des résultats (parlants) des dernières sénatoriales, ils iront vers une fracture en deux du FLN, avec la possibilité pour les gens fidèles à Benflis de déposer la même plainte, auprès de la même juridiction pour obtenir le même verdict. «Le conflit concerne des hommes et non pas des idées. Il faut savoir dépasser les passions et les intérêts personnels pour préserver l'intégrité physique et morale d'un parti comme le FLN.» Ce discours apaisant et qui rejoint en quelque sorte la fameuse troisième voie de Abderrezak Bouhara, est quand même contredit lorsque Hadjar «reproche aux gens de Benflis d'être descendus dans la rue pour subir la loi répressive signée de la propre main de leur secrétaire général au lieu d'utiliser la tribune idéale que leur offrait l'APN». Il ajoute, sur la lancée, que «les redresseurs s'empressent de condamner la justice quand elle rend des verdicts qui vont à l'encontre de leurs intérêts alors qu'ils savent très bien que nous nous sommes gardés d'en faire autant avec des arguments imparables concernant le fameux verdict rendu par le Conseil d'Etat». Sur un tout autre registre, Hadjar critique avec véhémence les signataires de la pétition appelant à démettre le président Bouteflika. «Le chef de l'Etat dispose d'un mandat qui dure encore trois mois. Ses détracteurs sont-ils donc si pressés? Ont-ils à ce point peur du verdict des urnes, comme ceux qui en appellent à l'arbitrage de l'armée?», s'est-il exclamé. Ainsi, avec un Belkhadem qui sillonne le territoire dans le but d'expliquer à sa manière le verdict rendu par la chambre administrative, un Hadjar qui prône une sorte de réconciliation sur le tard et des fidèles à Benflis résolus à aller jusqu'au bout, la crise qui secoue le FLN et, partant, pas mal d'institutions étatiques, nous réserve encore pas mal de surprises, bonnes ou mauvaises soient-elles.