La rencontre d'hier, qui a duré jusqu'à une heure tardive de la soirée, a permis de dégager les grandes lignes de la stratégie. Il sont venus. Ils sont tous là. Un imposant panel de personnalités politiques et de chefs de parti était hier l'hôte du général à la retraite Rachid Benyellès, au niveau de sa permanence électorale. Ahmed Benbitour, ancien chef de gouvernement, a été le premier à arriver. Chérif Belkacem est venu presque dans le même temps, réussissant à passer inaperçu. Effarouché par la presse, Benbitour a refusé de se faire prendre en photo et de faire la moindre déclaration. Quelques minutes plus tard, Mohamed Saïd et Ali-Yahia Abdenour arrivent ensemble. Souriant, le président de la Laddh n'a pas manqué de saluer tout le monde. Le secrétaire général de Wafa, lui, a indiqué être venu représenter Ahmed Taleb Ibrahimi, absent pour des raisons qui lui sont personnelles. Arrive alors la deuxième surprise de la journée. Outre Chérif Belkacem venu rejoindre ce front anti-fraude, Rédha Malek, président de l'ANR et ancien chef de gouvernement, est venu lui aussi. Le défilé se poursuivra ainsi avec Saïd Sadi, accompagné de Hamid Lounaouci, venu au volant de sa propre voiture, puis Mouloud Hamrouche, disparu de la scène politique depuis 1999, tout souriant devant les vieilles connaissances parmi les journalistes. Arrivent encore Ali Benflis, secrétaire général du FLN, puis Mokdad Sifi et un représentant du MSP en la personne d'Ahmed Dane. Outre ces onze chefs de l'opposition, on apprend que Djaballah pourrait rejoindre le mouvement, lui aussi, dès aujourd'hui. Le FFS, qui refusait d'inscrire sa démarche dans une logique électorale, aurait lui aussi donné son accord de principe puisqu'il devait prendre part à la rencontre avant d'annuler au dernier moment, laissant toutefois la porte ouverte à une possible présence aujourd'hui. En homme éduqué, sachant recevoir, Rachid Benyellès a permis à la presse de prendre quelques photos historiques, non sans l'accord des concernés. Cela, avant de nous expliquer que «les contacts, qui ont commencé au stade informel avant de se cristalliser autour de cette rencontre, peuvent expliquer les raisons de l'absence de deux partis de l'opposition comme le PT et le FFS». Rien n'indique, toutefois, qu'il ne viendront pas puisqu'il reste encore un long chemin à parcourir avant la présidentielle d'avril 2004. Les travaux, qui se sont déroulés à huis clos, ont duré jusqu'à 18 h 30 sans que la moindre information ait filtré. Les participants, au sortir, se sont accordés pour qualifier la rencontre de «fructueuse». Des sources ajoutent que le minimum consensuel a été dégagé et que les participants, encouragés par ce succès, ont cherché à cristalliser encore plus de points communs, puisque tous se sont accordés sur l'urgence de la situation, la menace de «hold-up politique» qui pèse sur le pays à la faveur du prochain scrutin. Nous apprenons également qu'une cérémonie de signature de ce manifeste doit avoir lieu aujourd'hui, à la permanence de Benyellès. Les conditions matérielles n'ont pas permis aux présents de tout achever hier. A cette occasion, seul Taleb, retenu par des empêchements n'ayant rien de politiques, ne sera pas présent. Un événement historique est donc attendu aujourd'hui puisque la quasi-majorité de la classe politique, y compris un parti membre de la coalition gouvernementale, vont parapher puis rendre public un manifeste portant sur une sorte de «Smig politique» visant à garantir un scrutin équitable. Des indiscrétions recoupées indiquent que les présents se seraient entendus sur la nécessité de la mise en place d'une commission indépendante dont les membres seront désignés suivant des critères à définir par la suite. Une parfaite liberté de manoeuvre politique est laissée aux présents, qui peuvent présenter leurs candidatures. Il n'est pas question d'aller vers un soutien à une seule personne, en vue de faire barrage au «candidat-président». Les alliances éventuelles sont également laissées à la discrétion de chaque participant, d'autant que certains peuvent rejoindre le mouvement chemin faisant et d'autres le quitter. En revanche, le consensus n'aurait pas été trouvé par rapport au départ d'Ahmed Ouyahia et de Yazid Zerhouni, même si la question a été soulevée avec insistance par de nombreux présents, croit-on savoir. Reste à dire que ce manifeste reste «perfectible» en fonction de l'évolution de la situation politique dans le pays.