Israël a menacé hier d'assassinat le vieux chef spirituel du mouvement Hamas. Le vice-ministre israélien de la Défense, Zeev Boïm, a menacé hier de mort le vieux cheikh palestinien, chef spirituel de Hamas, Ahmed Yassine, après l'attentat suicide de mercredi au cours duquel quatre soldats israéliens ont été tués. Le responsable israélien a affirmé que «Le cheikh mérite la mort et je lui conseille d'entrer dans la clandestinité», remettant ainsi à l'ordre du jour les assassinats ciblés de responsables politiques et militaires palestiniens. Ne pouvant venir à bout de la résistance palestinienne, et singulièrement de la deuxième Intifada -après la profanation par Ariel Sharon de l'Esplanade des Mosquées à El Qods-Est, le gouvernement israélien a élevé l'assassinat de responsables palestiniens au niveau de stratégie politique. Ainsi, allant à l'encontre de toutes les conventions existantes dans le monde, Israël a fait de l'assassinat de ses adversaires palestiniens une de ses tactiques privilégiées pour contrer ce qu'il n'a pu obtenir par les représailles et la répression. Refusant de reconnaître le caractère de lutte de libération à la résistance palestinienne, Israël continue de qualifier la résistance de terrorisme comme vient encore le faire le général israélien Gilad «Nous utiliserons tous les moyens nécessaires pour nous attaquer au terrorisme» estimant en outre que «la liquidation partielle de la direction de Hamas» aurait contribué au «calme relatif» qui prévaudrait en Israël. Propos qui avouent les assassinats délibérés d'hommes et de palestiniens par l'armée israélienne et qu'aucune bonne âme soucieuse des droits de l'Homme et de la vie humaine ne songerait à condamner. Réactions qui auraient été autres si cela avait été un responsable palestinien qui aurait émis des intentions aussi condamnables que celles proférées par le vice-ministre de la Défense et le général israéliens. Démentant toute responsabilité dans les attentats suicide, cheikh Ahmed Yassine affirmait hier, «Ils (les Israéliens) savent que cheikh Yassine n'a rien à voir avec l'action militaire mais ils cherchent un prétexte pour rassurer leur peuple et couvrir leur échec». Ajoutant: «Les menaces de mort ne nous font pas peur car nous somme en quête de martyrs». Réagissant aux propos des responsables israéliens, Nabil Abou Roudeina, conseiller du président Arafat, a indiqué «Une reprise de la politique de liquidation ramènera la région à la case départ et conduira à une escalade». Cheikh Yassine avait fait l'objet d'une tentative d'assassinat, l'été dernier, rappelle-t-on. Durant les deux dernières années, l'armée israélienne a fait du meurtre ciblé la forme privilégiée de lutte contre la résistance palestinienne, assassinant notamment, Abou Ali Moustapha, secrétaire général de Fplp (Front populaire le libération de la Palestine) en août 2001. Depuis, une longue liste de responsables politiques et militaires palestiniens ont froidement été tués par l'armée israélienne, devant une communauté internationale - certes scandalisée - dont le mutisme induit par son impuissance, renforce l'impunité d'Israël. La communauté internationale comptabilise et condamne vigoureusement les opérations palestiniennes, mais ne dit mot quand c'est Israël qui est responsable de la violence contre la population palestinienne qui a vu ses maisons dynamitées, ses champs et ses oliveraies détruits par l'armée israélienne. En réalité c'est Israël qui est l'occupant des territoires palestiniens qui, par son refus d'envisager un Etat palestinien indépendant, ne laisse pas le choix aux Palestiniens sinon celui de lutter par tous les moyens pour refaire reconnaître leurs droits. Toutefois, des voix palestiniennes commencent à se faire entendre contestant l'utilisation des et des enfants dans les opérations martyres. Ainsi, l'éditorialiste, du quotidien Al Hayet Al Jadida, proche de l'Autorité palestinienne, s'interrogeait hier sur le «bien-fondé du recrutement (...) des et d'adolescents pour commettre des attentats suicide anti-israéliens». En fait, l'affaire est liée au cas du jeune kamikaze, Iyad Al Masri, dont le père «a le droit de demander des explications à ceux qui l'ont envoyé à la mort» écrit hier l'éditorialiste du quotidien palestinien. De fait, la réticence des familles palestiniennes est de plus en plus marquée contre l'incorporation de leurs enfants dans la guerre contre l'occupation israélienne. Si les menaces contre le cheikh Yassine constituaient le fait du jour dans les territoires palestiniens occupés, au plan diplomatique, notons la visite en Israël du ministre irlandais des Affaires étrangères, Brian Cowen, dont le pays assume, depuis le 1er janvier, la présidence tournante de l'Union européenne. Comme tout néophyte en la matière, le chef de la diplomatie de Dublin qui dit vouloir «relancer» le processus de la feuille de route, indique en outre qu'il faut «que les pays arabes reconnaissent le droit à l'existence d'Israël». Le chef de la diplomatie irlandaise, sans doute mal informé, semble méconnaître la réalité du dossier proche-oriental et ignorer les fondements du conflit israélo-palestinien, revenant ainsi sur l'antienne de la reconnaissance d'Israël par les Arabes, semblant ainsi ne pas savoir que près d'une dizaine d'Etats arabes entretiennent des relations diplomatiques ou commerciales avec l'Etat hébreu. Il ne s'agit plus de la reconnaissance d'Israël dont l'existence est maintenant admise par ses voisins arabes, mais bien de la reconnaissance par Israël du droit à l'existence d'un Etat palestinien indépendant. C'est sur ce point que nous aurions aimé entendre le nouveau représentant de l'UE. De fait, l'existence d'Israël n'est plus en cause, et c'est encore l'Etat hébreu qui fait obstacle à l'existence de la Palestine. Et c'est cela le fond du contentieux israélo-palestinien. Car, à l'évidence, le processus de la feuille de route restera inapplicable tant qu'Israël occupe les territoires palestiniens de Cisjordanie, de Gaza et El Qods-Est, dont la consistance est consignée dans les résolutions de l'ONU dont celles N os 181 de 1947, 242 de 1967 et 338 de 19973. En fait, la paix au Proche-Orient, c'est l'existence de deux Etats : la Palestine et Israël tels que le prévoit la feuille de route.