Le leader islamiste n'en soutient pas moins le manifeste qui en a émané. Tout en soutenant l'objectif que visent les 11, à savoir une élection libre et transparente, Djaballah émet de sérieuses réserves sur la composante de ce groupe. Sans les citer nommément, le leader du MRN, qui s'est exprimé ce week-end à Zéralda déclare en des termes à peine voilés: «Nous ne pouvons nous asseoir avec des gens qui ont, dans un passé récent, opprimé les libertés individuelles et collectives. Nous ne signerons pas avec des personnes qui changent constamment de position.» Ainsi, le candidat à la présidentielle lève le voile sur sa non-participation au fameux front antifraude. Non seulement il explique sa position mais il l'a justifie. Si cette déclaration est fracassante, et elle l'est, elle ne nécessite pas, toutefois, une analyse poussée pour la décortiquer vu son ton tranchant. Il n'y a pas l'ombre d'un doute que les personnes ciblées sont à la fois les ex-chefs de gouvernement et le MSP. Concernant les premiers, Djaballah leur reproche d'avoir été des gens du système et donc contribué à la crise actuelle. Pis encore, il les accuse d'avoir privé le peuple de choisir librement son destin. Quant au deuxième coupable dans ce réquisitoire, Djaballah ne cache pas sa méfiance de s'allier avec un parti réputé pour sa versatilité. La stratégie du MSP qui consiste à ménager la chèvre et le chou en mettant un pied dans le gouvernement et l'autre dans l'opposition suscite de vives interrogations sur la sincérité de ses démarches. «Le reste du groupe, il n'y a aucun problème avec eux», rassure le président d'El-Islah en affirmant même l'existence de contacts avec Benflis du FLN, Taleb de Wafa et Ali Yahia Abdenour de la Laddh. Cela dit, «ni la neutralité de l'armée ni l'initiative des 11 ne pourront garantir un scrutin honnête», estime Djaballah en expliquant que «le pouvoir ne satisfera jamais ces doléances car s'il le fait cela est synonyme de son départ». Devant cette impasse, El-Islah prône deux thérapies qu'il qualifie d'«urgentes et d'efficaces» en perspective du rendez-vous décisif d'avril 2004. D'abord, réhabiliter le rôle des instances élues (APN, APW, APC) dont les prérogatives permettent de contrôler les autorités. Dans cette optique, Djaballah indique: «Nous sommes un partenaire dans toutes les assemblées élues. Il faut arracher ces prérogatives.» Le passage à l'action se fera cette semaine lorsque le MRN demandera à l'APN la création d'une commission d'enquête sur la gestion des finances par les autorités. Par cette proposition, El-Islah vient de corroborer la revendication des archs qui demandent de mettre le pouvoir exécutif sous l'autorité des élus. Le deuxième volet de ce «plan Orsec» concerne directement le scrutin présidentiel. A ce propos, Djaballah annonce «d'intenses concertations avec les autres candidats dans l'optique d'un contrôle effectif de cette opération». Ce qui est certain pour El-Islah, c'est que l'intégrité des élections doit être imposée par les candidats et non sollicitée à l'administration. Pour cette raison, le parti islamiste envisage la création d'une autre commission de contrôle du scrutin tout en réitérant sa demande du départ des ministres de l'Intérieur et de la Justice comme gage d'une élection crédible. A signaler que la candidature de Djaballah à la présidentielle 2004 sera confirmée le 29 de ce mois lors d'un rassemblement au Palais des Expositions. Une occasion, aussi, pour le parti de présenter son nouveau programme électoral.