A 52 jours du rendez-vous du 8 avril, l'échiquier politique, marqué par les grandes alliances de circonstance, reste gravé par la touche de Djaballah. Devant une coalition présidentielle qui se renforce de jour en jour, un Benflis qui bénéficie du soutien de plusieurs associations et un groupe des dix déterminé à peser sur les conditions du scrutin, le leader islamiste a décidé de faire cavalier seul et se passer de tout appui extra-muros. En intervenant ce week-end devant ses militants, le président d'El Islah, confiant et serein, relève que son objectif est la victoire et non une simple formalité. C'est dire que le mur des 75.000 signaturaes est d'ores et déjà franchi grâce à l'ancrage social du MRN. Les jeux seront plus clairs dans une semaine où le conseil constitutionnel va valider les dossiers de candidatures. Dans la mouvance islamiste, Djaballah s'impose comme le seul opposant légal du pouvoir, après que le MSP et Nahda se sont mis dans l'escarcelle de Bouteflika. Même Taleb, avec son charisme islamo-nationaliste, ne peut faire de l'ombre à ce rival âgé de 48 ans, qui est à la tête de la seconde force politique du pays, cas d'espèce à plus d'un titre. Alors qu'un front anti-fraude s'est constitué pour garantir la régularité du scrutin, l'ex-candidat à la présidentielle de 1999, a, même s'il a accueilli cette initiative, émis de sérieuses réserves sur la composante du groupe. Conséquent avec lui-même, Djaballah a déclaré refuser de s'asseoir avec des gens qui ont privé le peuple de choisir son destin et d'autres qui changent constamment de position. Sans aucun doute, le chef du MRN cible, d'une part, tous les acteurs politiques qui ont côtoyé les sphères du système et d'autre part, le MSP réputé pour son entrisme. Pour celui qui a appelé à la poursuite du processus électoral de 1991 et qui était un artisan du contrat de Sant Egidio, il n'est pas question de s'allier aujourd'hui avec les ennemis d'hier. Cette constance à la limite du radicalisme ne peut laisser indifférent le réservoir électoral du FIS dissous, même si aucun soutien solennel n'est encore affiché. Quant au groupe des dix, dont Hamrouche a déjà jeté l'éponge, son effet semble plutôt médiatique que politique. Hormis Benflis et Taleb qui peuvent dépasser le cap des 75.000 signatures, le premier en misant sur les résultats des législatives 2002 et de l'appui de l'Unea et le second sur l'expérience de la présidentielle de 1999. Mais, à voir Bouteflika sillonner tout le pays et distribuer des centaines de milliards à chaque halte, seuls Benflis et Djaballah pourront faire le poids dans ce combat inégal. Mais, dans ce cas de figure, Djaballah s'illustre aussi par cette solitude politique, qui fait curieusement sa force. Sauf incident de parcours, tout indique que le chef de file islamiste va mener, contre vents et marées, la course présidentielle en solo. Au bout du compte, c'est le projet d'une République islamiste qui va refaire surface ou un second mandat pour Bouteflika.