Soumis au feu roulant de l'opposition et de certains médias pour un «grand coup de balai», l'exécutif français était dans ses petits souliers hier dans la grave crise politique qui secoue la France depuis le scandale Cahuzac. Trois hommes, dont l'autorité est mise à mal, concentrent les critiques: François Hollande au verbe qui se veut toujours haut, Jean-Marc Ayrault comme accablé par le sort, et Pierre Moscovici qui s'affiche droit dans ses bottes. Pas de remaniement dans l'immédiat, volonté d'aller «jusqu'au bout» de la moralisation politique: le président socialiste français, qui s'est trompé lourdement en choisissant un détenteur d'un compte secret à l'étranger comme ministre du Budget pour lutter contre la fraude fiscale, est au coeur des critiques de l'opposition, de l'extrême droite à la gauche radicale. «Ca n'est pas le gouvernement qui est en cause, c'est un homme qui a failli», a rétorqué jeudi le chef de l'Etat à propos de Jérôme Cahuzac, en excluant tout remaniement dans l'immédiat. Depuis deux jours, le premier parti d'opposition, l'UMP, réclame un «changement complet» de gouvernement pour sortir de la crise. «François Hollande ne peut pas s'en sortir en disant: «Circulez, y a rien à voir!», a aussi estimé hier la présidente du Front national (extrême droite) Marine Le Pen, tandis que le dirigeant de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon appelait à un «grand coup de balai», jugeant que le scandale a révélé la «pourriture» du «système». En onze mois de pouvoir, la popularité du président n'a cessé de chuter, sous les coups de boutoir de la déflagration économique et sociale qui touche l'Europe. L'affaire Cahuzac représente la plus grave crise interne que le chef de l'Etat ait à gérer et hier, pour nombre de médias, elle était loin d'être finie. «Hollande: l'impasse», titrait ainsi le quotidien conservateur Le Figaro alors que Libération (gauche) parlait d'un «Hollande assiégé». La défense de son Premier ministre Jean-Marc Ayrault, à l'autorité souvent bafouée par ses propres ministres, se fait chaque jour plus difficile. Sans expérience ministérielle - le président n'en a pas non plus -, l'ancien maire d'une grande ville de l'ouest, Nantes, peine à convaincre. Ses apparitions ces derniers jours, ont montré un homme abattu, au dos courbé. Peu charismatique, Jean-Marc Ayrault, qui n'affiche aucune ambition présidentielle contrairement à nombre de ses prédécesseurs, continue jusqu'à présent de bénéficier du soutien indéfectible du président. «Travaillons d'abord à ce que nous avons à faire avant de spéculer», s'est borné à dire jeudi le Premier ministre interrogé sur un éventuel remaniement. Chargé de l'Economie, Pierre Moscovici, un des piliers de son gouvernement, sort fragilisé du scandale provoqué par Jérôme Cahuzac, ministre dont il avait la tutelle. Pour contrecarrer la crise économique, ces deux responsables étaient au coeur du dispositif de François Hollande pour tenter de redresser le pays, tenir la barre budgétaire et faire accepter aux Français et à l'administration une sévère cure de rigueur. Depuis mardi, la droite accuse Pierre Moscovici d'avoir protégé Jérôme Cahuzac entre la révélation en décembre de son compte secret à l'étranger et sa démission en mars. Elle réclame avec véhémence son départ du gouvernement.