La déconfiture sur le terrain politique a poussé l'ETA à opter pour la violence pure. Malgré certains détails troublants accréditant la thèse d'Al-Qaîda, la piste basque demeure très crédible aux yeux des spécialistes des affaires terroristes en Espagne. En effet, plusieurs indices attestent de la très probable implication de l'ETA dans les attentats de Madrid. Il y a d'abord le fait que cette organisation terroriste basque avait tenté de commettre un attentat selon la même méthode, avec des sacs à dos bourrés d'explosifs du même type, dans une autre gare de Madrid, Charmartin, la veille de Noël. L'interception d'une fourgonnette bourrée de 500 kilos d'explosifs il y a dix jours avec une carte de la zone d'Alcala de Henares, constitue un autre indice privilégiant la thèse de l'ETA. De plus, les mêmes experts relèvent que la dynamite est un explosif de prédilection de cette organisation terroriste. L'absence de revendication de la part de l'ETA n'est pas un élément qui l'innocenterait, pour la simple raison, dit-on, qu'il est connu que les éléments de l'ETA ne justifient leurs actions que tardivement. Cependant, dans la tradition de ce groupe basque radical, les autorités sont généralement prévenues quelques minutes avant un attentat, le but étant d'éviter des victimes civiles. Or, pour l'attentat de ce jeudi, il n'en a pas été de même. Les spécialistes de l'ETA estiment, pour leur part, que cela ne disculpe pas pour autant cette organisation. Ils avancent, pour ce faire, un argument de taille, à savoir que la perte subie sur le terrain politique, avec le désintérêt croissant de la population basque quant à la revendication d'indépendance brandie par l'aile politique du mouvement terroriste, Batasuna, a poussé les éléments de l'ETA à opter pour une action d'envergure aux fins de remettre la question de l'indépendance de la province basque au-devant de la scène. Les experts du terrorisme basque relèvent également que l'arrestation de nombreux penseurs de l'ETA a conduit à une dépolitisation du mouvement au profit d'une thèse militariste qui prône la violence pure. Tous ces arguments militent pour la responsabilité directe de l'ETA dans la série d'attentats qu'a vécus la capitale espagnole jeudi dernier. Cela dit, pour l'heure, aucune preuve n'est avancée par les services de sécurité pour appuyer cette thèse. Il n'en demeure pas moins que les enquêteurs ne la négligent pas pour autant. Hier en fin d'après-midi, l'ETA a démenti «toute responsabilité» dans les attentats de Madrid, dans un appel téléphonique d'un correspondant anonyme reçu vendredi au journal indépendantiste basque Gara, canal habituel de communication de l'organisation basque armée. Cependant, cette réaction ne ferme pas la piste basque pour autant.