Une élection «propre, honnête et transparente» permettrait l'ancrage définitif de la pratique démocratique dans les moeurs politiques. L'Algérie s'apprête à élire aujourd'hui le troisième président de la République depuis l'avènement du pluralisme politique et qui pourrait déboucher, pour la première fois, sur un second tour. Après une campagne qualifiée de féconde, en dépit de quelques escarmouches enregistrées, place maintenant à l'urne et à son verdict. En fait, l'enjeu de demain, au demeurant fort simple, consiste à faire le bon choix pour élire l'homme qui devra faire passer l'Algérie avant toute autre considération personnelle et partisane. En d'autres termes, le futur président de la République devra propulser l'Algérie dans l'ère de la modernité, et par ricochet réconcilier les Algériennes et les Algériens avec leur gouvernement en instaurant un Etat de droit. Enfin, l'homme qui saura donner l'opportunité aux investisseurs nationaux et étrangers de participer au développement du pays. Sur le plan purement politique, une élection «propre, honnête et transparente» permettrait l'ancrage définitif de la pratique démocratique dans les moeurs politiques. Ce qui augurerait une bonne voie à l'apprentissage du pluralisme politique. En outre, de la réussite de cette échéance dépend la relance effective de la machine économique nationale du moment que le frein de l'investissement n'est autre que l'absence de stabilité et de crédibilité. Enfin au plan social, elle devrait permettre le retour d'une vie normale. Tandis qu'au plan international elle devrait renforcer l'intégration de l'Algérie dans le giron des grandes nations. Dans ce contexte, le choix des citoyens est simple du fait que deux options se présentent. En effet la campagne qui s'est achevée lundi a été marquée par la bataille entre deux projets «diamétralement opposés». Les citoyens auront à choisir entre la continuité dans le redressement que propose le président-candidat et le changement par la modernité que soutiennent Ali Benflis et Saïd Sadi. Le premier cité a axé son programme électoral sur la réconciliation nationale dont il a fait son cheval de bataille. En outre M.Bouteflika table sur le bilan d'un quinquennat qu'il qualifie de positif en dépit des critiques de l'opposition. Sur ce point, une majorité de la population croit que Bouteflika doit bénéficier de plus de temps pour parachever son oeuvre de reconstruction d'un pays fracturé par la décennie noire. «Un des mérites de Bouteflika, c'est d'avoir amélioré l'image du pays, même s'il a négligé la vie quotidienne, ce qui devra être désormais la priorité lors de ce deuxième mandat», estiment certains, allusion au chômage et à la pauvreté qui touchent beaucoup de citoyens. Cependant et en dépit de son charisme et de son talent d'orateur habile, Bouteflika n'a pu effacer de la mémoire populaire son échec dans la crise de Kabylie qui a entraîné dans son sillage plusieurs émeutes et manifestations au niveau national. Considérée comme la crise majeure de son quinquennat, la crise de Kabylie aura été une déception pour cet homme qui disait avoir pris les rênes de l'Etat pour asseoir la paix et la réconciliation nationale. Les seconds prônent pour leur part une rupture complète avec le système en cours et proposent un changement radical. D'ailleurs Ali Benflis estime, à juste titre, que la réconciliation entre le peuple et son Etat passe par le «respect de la souveraineté du peuple, la fin de l'injustice et la garantie de la liberté d'expression». Chose qui a fait dire à Abdelkader Salat, directeur de campagne de Benflis «nous passerons au premier tour du fait que toutes les grosses cylindrées de la scène politique sont contre Bouteflika, il n'aurait dans ce cas que le soutien du RND et du MSP». En effet M.Benflis, qui s'appuie sur la machine électorale du FLN, a obtenu le soutien du président de Wafa (parti non agréé), encore influent dans les milieux islamistes, de Sid- Ahmed Ghozali, de nombreux intellectuels et personnalités historiques. Tandis que Saïd Sadi, tout en rejoignant Benflis dans ses grands axes, prêche pour la séparation des pouvoirs et le retour au week-end universel. Cependant, le futur président aura fort à faire pour trouver rapidement des solutions aux problèmes du chômage, du logement, de l'approvisionnement en eau et de l'enclavement des campagnes pour éviter le retour des émeutes qui ont terni le dernier quinquennat. Mais la particularité du scrutin d'aujourd'hui réside dans la neutralité affichée par l'armée. Ce qui constitue une première pour l'élection du président de la République. Le chef d'état-major le général Mohamed Lamari, a souligné que l'institution militaire n'entendait «ni gêner ni favoriser» l'un des candidats. Il faut relever en effet, que pour la première fois, dans la courte vie du pluralisme politique algérien, une campagne électorale a été menée de bout en bout, sans réel dérapage, par des candidats qui ont fait montre de beaucoup de convictions et croyaient en ce qu'ils disaient, ou proposaient. Cela a eu un impact certain sur les électeurs, intention qui doit se traduire aujourd'hui par une participation massive au scrutin, seule alternative à même de donner aux citoyens de peser de tout leur poids en peuple souverain pour imposer l'homme le plus à même de sortir l'Algérie de l'instabilité et de l'immobilisme.